Alerte ! La Cour des comptes refuse de certifier les comptes retraite de la sécu
publié le 02-07-2009
A l’heure où cotisants et retraités sont invités à se serrer la ceinture, la gestion de nos caisses de retraite va à vau-l’eau.
« Au terme de ses vérifications, (…) la Cour n’est pas en mesure de certifier (…) que les comptes combinés de la branche retraite sont réguliers, sincères et donnent une image fidèle de la situation financière et du patrimoine de la branche ». C’est en ces termes accablants que Rolande Ruellan, présidente de la 6e chambre de la Cours des comptes, a présenté le résultat de l’audit que ses services ont réalisé au sein de la Sécurité sociale.
Comment en est-on arrivé à une telle extrémité ? Quelle faute les gestionnaires de la branche retraite ont-ils commise ?
Soyez bien assis. Car, ce n’est pas un dysfonctionnement que la Cour des comptes a fustigé et qui l’interdit de certifier les comptes mais… neuf ! Et, pour la plupart, d’une gravité confondante :
1 – Aussi invraisemblable que celui puisse paraître, la Cnav a été incapable de communiquer à la Cour les fonctionnalités, les règles de gestion et de contrôles automatisés de la chaîne des paiements des retraites. Autrement dit, les fonctionnaires de la Cnav n’ont plus en mémoire la manière dont, techniquement, les retraites sont versées. D’emblée, cette incapacité a posé une limite rédhibitoire aux travaux d’audit de la Cour…
2 – Plus de 5,4 % des pensions de retraite attribuées en 2008 comportent une anomalie financière en faveur ou au détriment des assurés. 5,4 % cela fait plus d’un retraité sur vingt qui est touché ! Sans compter que la Cour des comptes a précisé qu’il s’agissait d’une estimation basse… (« Ce taux étant bien supérieur dans certains organismes »).
3 – A côté de ces erreurs qualifiées de « ponctuelles », il y a les erreurs « systématiques ». C’est-à-dire des erreurs qui sont commises à tous les coups et depuis des années ! Parmi les principales figurent le cas des trimestres attribués, en surplus, aux chômeurs. Ce scandale, évalué, pour l’instant, à 2,5 milliards d’euros, a déjà défrayé la chronique. Mais, cette erreur n’est pas isolée. La Cour des comptes ajoute que des erreurs à caractère systématique ont également été détectées dans le décompte des jours durant lesquels les affiliés ont pu percevoir une rente au titre des accidents du travail ainsi que dans la détermination des périodes validées pour la retraite au titre de la naissance des enfants. Enfin, fait inouï : personne n’est capable de déterminer depuis quand ces erreurs sont répétées !
4 – Il n’est pas fait de rapprochement entre le montant des salaires déclarés par les employeurs pour servir de base au calcul des retraites et le montant des salaires sur la base desquels ils versent leurs cotisations. Dès lors, des cotisations payées peuvent ne pas ouvrir de droits à la retraite tout comme des droits peuvent être ouverts sans paiement des cotisations correspondantes.
5 – Dans certains cas, les révisions nécessaires des pensions déjà attribuées ne sont pas réalisées. Exemple : lorsque l’arrivée tardive des derniers bulletins de salaire justifie une révision de la retraite déjà liquidée, cette révision n’est pas toujours réalisée ou l’est de manière erronée.
6 – Les applications de paiement des retraites et les modes de contrôles internes ne sont pas opérés de manière suffisante « au regard du risque de fraude interne ».
7 – Un certain flou plane également sur les comptes de la branche famille de la sécurité sociale (CNAF). Dans ce contexte, la Cour des comptes ne peut pas certifier que le montant des cotisations vieillesse versées par la CNAF à la CNAV au titre des cotisations AVPF (avantage vieillesse des parents au foyer) soit juste.
8 – La Cour des comptes n’est pas en mesure de contrôler si les cotisations dues par le régime spécial des industries électriques et gazières (essentiellement EDF et GDF) à la CNAV sont versées dans leur totalité.
9 – Les comptes de la MSA (caisse de retraite des agriculteurs) n’ont pas, non plus, été certifiés par les commissaires aux comptes… Or, comme le régime des salariés agricoles est intégré financièrement à la CNAV (qui comble une bonne partie des déficits de la MSA), l’incertitude liée aux comptes de la MSA rejaillit, de facto, sur ceux de la CNAV.
Alors que les hommes politiques ne cessent de nous demander de cotiser plus et plus longtemps pour toucher une retraite de plus en plus faible, la gestion de nos caisses de retraite est déplorable !
NB : cette situation inadmissible que la Cour des comptes fait mine de découvrir aujourd’hui dure, en réalité, depuis des années… Or, la présidente de la 6e chambre de la Cour des comptes qui fustige la gestion de la CNAV n’est autre qu’une ancienne directrice de la… CNAV ! Cela ne remet en cause ni son intégrité, ni ses compétences qui sont reconnues de tous. Mais cela démontre à quel point les contrôles (ou plutôt auto-contrôles…) réalisés auprès des caisses de retraite sont une mascarade. Plus que de véritables audits, ils relèvent de démarches politiques qui n’intéressent que les administrations dans les luttes d’influence et de pouvoir qu’elles se livrent entre elles.
Ce constat ne fait que conforter la nécessité, comme le demande Sauvegarde Retraites, de créer des organismes parlementaires, véritables commissions permanentes de contrôle de nos retraites.
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