Grande menace sur nos retraites après les élections

Revenir à la retraite à 60 ans est une des principales promesses de campagne du Nouveau Front Populaire, qui bénéficie d’une majorité très relative à l’Assemblée nationale. Mais est-ce envisageable, vu la situation financière des retraites et, plus largement, celle des finances publiques ?

La situation financière des retraites était déjà suffisamment compromise pour avoir obligé les gouvernements successifs, de droite comme de gauche, à engager des réformes, depuis celle d’Edouard Balladur, en 1993, jusqu’à celle d’Elisabeth Borne, trente ans plus tard. Pour ne retenir que les quatorze dernières années, la réforme Woerth de 2010 a reporté l’âge légal de départ à la retraite de 60 à 62 ans (Nicolas Sarkozy président) ; puis, la réforme Touraine de 2014 a allongé la durée de cotisation à 43 ans (sous la présidence de François Hollande). En 2017, Emmanuel Macron, à son tour, a promis une réforme structurelle : après celle d'Édouard Philippe en 2020, vite abandonnée, Elisabeth Borne a procédé, en se heurtant à de fortes oppositions, à une réforme limitée pour l’essentiel à une mesure paramétrique : un nouveau recul de l’âge légal de départ, porté cette fois à 64 ans.

À chaque fois, les gouvernements affirment, pour faire " passer la pilule ", que le problème des retraites est réglé pour longtemps. Et à chaque fois, les réalités économiques contraignent leurs successeurs à remettre l’ouvrage sur le métier.

Sans rien régler sur le fond, ni durablement, la réforme Borne a toutefois permis de donner de l'air à un système à bout de souffle. Le report de l'âge légal de départ à 64 ans a eu pour effet immédiat la prolongation du temps de cotisation des personnes conduites à différer leur départ à la retraite et la diminution de leur effectif. Cela a permis au régime de retraite complémentaire des salariés du secteur privé, AGIRC-ARRCO, de réaliser, grâce à l’effort de ses affiliés, une économie évaluée par l’ancien ministre du Travail Olivier Dussopt à 1,2 milliard d’euros à l’horizon 2026 (ce dont le gouvernement prétendit tirer argument pour tenter de prélever sur le régime du privé un tribut qui n’était ni plus, ni moins qu’une spoliation).

Inversement, le retour à la retraite à 60 ans se traduira par des pertes sensibles et les syndicalistes gestionnaires de l’AGIRC-ARRCO (qui appartiennent aux mêmes centrales qui défendent mordicus les ruineux avantages retraite des régimes spéciaux du public) le savent pertinemment. Il est donc parfaitement hypocrite, de la part des syndicats, d’applaudir au retour à la retraite à 60 ans sans prévenir les affiliés au régime complémentaire des salariés du privé des conséquences très douloureuses qu’une telle mesure entraînera inévitablement pour eux, à savoir :

- une augmentation de la valeur d’achat du point

- la non-revalorisation des retraites

- et une réduction accélérée des réserves du régime, qui sont une précaution pour affronter les prochaines années.

Quant aux retraités du privé qui ont anticipé la baisse de leur pension en épargnant en prévision de leurs vieux jours, ils ne sont pas à l’abri non plus. Dans un entretien publié par Boursorama au mois d’avril dernier, l’écologiste Sandrine Rousseau, député NFP, déclarait que « la France est un pays où il y a une épargne qui nous permettrait de reprendre très bien la main sur notre dette », quitte à contraindre les épargnants. C’est-à-dire à faire main basse sur leurs économies.


Fermer