Retraites chapeaux : pour une réforme plus ambitieuse

Elles vont être indexées sur la performance et la santé financière de l’entreprise. Un principe à appliquer d'abord aux régimes spéciaux, en commençant par ceux de nos élus.

Encadrer plutôt que supprimer : c’est la nouvelle ligne d’Emmanuel Macron sur les « retraites chapeaux », ces régimes d’entreprises à prestations définies qui ont fait couler beaucoup d’encre au moment de l’affaire Mestrallet. Puisque quelques grands dirigeants ont touché des sommes très importantes sans avoir démontré leur performance, il s’agirait d’indexer la retraite chapeau sur la performance de l’entreprise et sa santé financière.
En soi, cette mesure d’encadrement revient à supprimer la notion de « prestation définie », puisque celle-ci sera alors conditionnée par des critères par nature indéfinis : la performance à venir de l’entreprise. Qu’il faille une loi pour adopter une telle mesure traduit la pauvreté du dialogue social. Mais l’essentiel n’est pas là…
L’essentiel, c’est la remise en cause de ce principe de « prestations définies » : le montant de la pension est fixé à l’avance, quelle que soit la santé financière de l’entreprise. Voici en effet un principe de gestion très hasardeux. Or, c’est dans les régimes spéciaux que ce principe de prestations définies est le plus massivement appliqué.
Ainsi, pourquoi le gouvernement ne pousserait-il pas sa logique jusqu’au bout en indexant les prestations des régimes spéciaux sur la santé financière des régimes de droit commun et/ou des finances publiques ?
Pourquoi ne pas commencer par les élus eux-mêmes ? Par exemple, les députés bénéficient quoi qu’il arrive de confortables pensions à « prestations définies », financées à 80 % par le contribuable.
Le gouvernement n’hésite pas à s’immiscer dans les affaires du secteur privé (qui ne coûtent pas un euro au contribuable), il est temps de s’intéresser aussi aux bonnes affaires du secteur public, ces régimes spéciaux qui concernent tous les Français. Il s’agirait simplement pour l’Etat de s’appliquer à lui-même les principes de bons sens et de saine gestion qu’il entend appliquer au privé.
Ce serait une mesure cohérente car les régimes spéciaux pèsent lourd sur nos finances publiques et concernent 8 millions d’affiliés, dont 4 millions de retraités, tandis que les « retraites chapeaux » – indolores pour le contribuable – ne concernent in fine que 200 000 personnes, dont 84 % touchent moins de 5 000 euros par an, selon un rapport récent de l’inspection des finances. Quant aux retraites de Nababs des grands dirigeants, ce même rapport compte 50 personnes qui touchent plus de 300 000 euros par an…
Alors, très bien pour les principes de bonne gestion, mais il faudrait revoir l’ordre des priorités et commencer par faire le ménage là où l’urgence sonne, dans ces administrations publiques qui pèsent de plus en plus lourd sur l’ensemble de la collectivité.
Le mois prochain vont s’ouvrir les négociations sur les régimes complémentaires du privé, qui laissent déjà présager des baisses de rendement pour tenir compte de la situation financières des caisses Agirc-Arrco. Les salariés du privé savent ce que c’est, eux, d’avoir des prestations non définies en phase avec les réalités économiques.

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