L'inéquitable réforme du capital décès
"L’équité " a bon dos, lorsqu’elle arrange nos politiciens.
L’une des mesures inscrites dans le projet de loi de finances de la Sécurité sociale pour 2015 s’abrite derrière cet alibi pour permettre à l’Etat de réaliser une économie de 158 millions d’euros par an sur le dos des prétendus « riches » : le montant du capital décès versé par la Sécurité sociale aux ayant-droits d’un salarié décédé - qui représentait jusqu’à présent trois mois de son salaire - sera plafonné à 3 384 euros.
À en croire le gouvernement, le dispositif actuel, « étant déterminé en fonction des salaires du défunt, (…) se révèle donc injuste pour les personnes les plus précaires », et la nouvelle mesure permettra au contraire de « garantir plus d’équité entre les ayant-droits… ». Dans l’étude d’impact du PLFSS 2015, on peut lire, en effet, que le montant actuel du capital décès ne peut être inférieur à 1 % du montant du plafond annuel de la Sécurité sociale, soit 375 euros, ni supérieur au quart du dit plafond, soit 9 387 euros. La différence est certes considérable !
Du moins si l’on n’y regarde pas de plus près… et si l’on évite de se demander combien de salariés français gagnent 375 euros brut par trimestre, soit 125 euros par mois.
Rappelons que le smic s’élève à 1 445,38 euros brut mensuel, soit 4 336 euros par trimestre – somme qui excède de 952 euros le montant annoncé du forfait (3 384 euros).
L’ "équité" gouvernementale consistera donc à retirer 952 euros aux veufs ou veuves des smicards !
En outre, si l’équité entre les affiliés à la Sécurité sociale préoccupait vraiment le gouvernement, il veillerait plutôt à la rétablir entre le régime général et les régimes spéciaux, qui sont privilégiés même devant la mort : les ayant-droits des retraités affiliés aux régimes des industries électriques et gazières et de la SNCF perçoivent en effet un capital décès, alors qu’au régime général, seuls les ayant-droits des actifs en bénéficient…
Passe encore que l’Etat grappille et rogne tout ce qu’il peut, puisque, faute d’avoir voulu réaliser quand il en était temps les réformes indispensables, les caisses de la Sécurité sociale sont aujourd’hui vides mais le gouvernement pourrait au moins éviter de prendre les Français pour des demeurés, en habillant ces coups de rabot de prétextes faussement vertueux !
- Mots clés :
- régimes spéciaux ; inégalité public privé