Réforme des retraites : le serpent qui se mord la queue

Le nouveau Premier ministre, Sébastien Lecornu a indiqué qu'il ne toucherait pas à la réforme Borne de 2023 et notamment au report de l’âge légal de départ à 64 ans.

Nous voilà donc revenus au même point qu’à l’automne 2024, lorsque le sujet des retraites fit tomber le gouvernement Barnier. Le serpent de la « réforme » se mord la queue.

Entretemps, le passage à Matignon de François Bayrou n’a rien produit, sinon un fruit pourri : l’audit flash des retraites publié par la Cour des comptes a contredit l’évaluation du déficit des retraites du Premier ministre, issue des travaux du Haut-commissariat au Plan qu’il avait antérieurement dirigé, et a dissimulé, non seulement l’ampleur abyssale du déficit des retraites, mais aussi le poids des régimes spéciaux de la fonction publique, qui contribuent considérablement à creuser le déficit et la dette publics. Dans cet « audit », la Cour des comptes a ainsi délibérément évité de prendre en compte les subventions déguisées aux régimes des fonctionnaires – en particulier les 46 milliards d’euros de « surcotisations » destinés à « équilibrer » les pensions de la fonction publique de l’Etat, aux dépens des contribuables actuels et futurs.

Au bout de la comédie, comme il fallait s’y attendre, le pseudo « conclave » des « partenaires sociaux » voulu par François Bayrou n’a mené à rien – sinon à permettre à ce dernier de se maintenir quelques mois à Matignon. Avant de partir, l’ancien Premier ministre a déguisé son échec en tirant (à juste titre) la sonnette d’alarme sur l’état catastrophique des finances françaises, mais aussi en alimentant le conflit des générations pour tenter de justifier les mesures fiscales que l’Etat prépare contre les retraités. Nous voilà loin de la « solidarité générationnelle » qui était censée justifier le système par répartition !

Retour à la case départ, donc! Sébastien Lecornu entend faire appliquer la réforme Borne et les syndicats appellent comme précédemment à la grève. La querelle se noue de nouveau autour du recul de l’âge de départ, mesure qui améliorera provisoirement la situation financière des retraites, mais ne résout rien durablement et revêt un aspect contraignant – alors qu’une réforme structurelle pourrait rendre aux affiliés la liberté de choisir le moment de leur départ, en fonction du montant de pension dont ils jugeraient avoir besoin (partir tôt avec une pension moindre, ou tard avec un montant de pension plus important).

Le gouvernement n’est pas sorti de l’ornière. Les retraités non plus, puisqu’ils restent menacés par les mesures coercitives annoncées par François Bayrou et préparées par les services de Bercy (suppression de l’abattement fiscal de 10 % par foyer, gel du barème de l’impôt sur le revenu et de la CSG). C’est cher payer l’incapacité de l’Etat à mettre en place la grande réforme structurelle et équitable promise en 2017 par Emmanuel Macron !


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