Une nouvelle menace sur les réserves Agirc-Arrco

Dans son dernier avis, le Comité de suivi des retraites propose de relever le plafond de la sécurité sociale pour diminuer la part des cotisations de retraite qui échoie à l’Agirc-Arrco, au bénéfice du régime général (Cnav), déficitaire. Une nouvelle tentative de l’Etat pour faire main basse sur les réserves du régime complémentaire du privé.

Le 15 juillet, le Comité de suivi des retraites (CSR), sorte de " comité Théodule " dont les analyses s’inscrivent dans le sillage de celles du Conseil d’Orientation des Retraites (COR), a publié son « avis » annuel. Il s’y « interroge » sur l’importance des réserves de l’Agirc-Arrco, qui représentent une tentation permanente pour les gouvernements.

Le CSR convient, certes, que « l’option de puiser dans les réserves » ne serait pas « pertinente » pour combler le déficit durable des retraites. Mais il « s’interroge toutefois sur le fait que, si ses excédents se confirmaient, ce régime verrait ses réserves continuer de s’accroitre, pendant que se cumuleraient les déficits pour le régime de base ». Il se pose donc « la question d’un rééquilibrage des taux de cotisation entre base et complémentaire qui éviterait ces trajectoires divergentes, une fois établie une doctrine sur le bon niveau à avoir pour ces réserves de l’Agirc-Arrco. »

Pour « rééquilibrer » les taux de cotisation entre l’AGIRC-ARRCO et la CNAV, le CSR préconise de relever le plafond de la sécurité sociale, qui constitue « une ligne de partage entre régime de base et complémentaire ». Ce relèvement du plafond permettrait d’élargir la large part des cotisations dont bénéficie la CNAV et de réduire concomitamment celle attribué à l’AGIRC-ARRCO. Si l’avis du CSR est suivi d’effet, une telle opération ne sera pas neutre : elle contraindra le régime complémentaire du privé à piocher dans ses réserves pour payer les pensions de ses affiliés retraités.

En effet, la « doctrine sur le bon niveau à avoir pour ces réserves » est d’ores et déjà établie : l’AGIRC-ARRCO est tenue d’avoir un budget financièrement équilibré et de disposer de réserves équivalent au minimum à six mois de paiement des pensions. Ces réserves en représentent aujourd’hui environ dix mois, ce qui n’a rien d’excessif en prévision des défis que le régime complémentaire devra relever dans un proche avenir : on comptera deux millions de nouveaux retraités d’ici à 2030 et quatre millions d’ici à 2040, dont le plus grand nombre est affilié aux régimes du secteur privé. En regard, le nombre des cotisants restera stable. L’AGIRC-ARRCO devra donc puiser dans ses réserves pour maintenir son budget à l’équilibre, si elle veut éviter une accélération de la diminution des taux de remplacement (montant de la retraite par rapport au dernier salaire), qui n’ont cessé de baisser depuis trente ans aux dépens de ses affiliés.

L’idée avancée par le CSR n’est que la énième tentative de l’Etat en vue de siphonner le régime complémentaire des salariés du privé pour renflouer les caisses des régimes qu’il gère – en premier lieu le régime général, puis, possiblement, les régimes spéciaux par un jeu de vases communicants dans lequel l’Administration est passée maîtresse.

Les cotisants et retraités du privé devront être attentifs et s’opposer dès à présent à ce nouveau coup de Jarnac. Si l’Etat veut résorber ses déficits, qu’il commence par assainir sa propre gestion, plutôt que de piller des économies qui ne lui appartiennent pas, réalisées grâce aux efforts des affiliés à l’AGIRC-ARRCO.


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