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Les sophismes de la majorité pour tenter de justifier le hold-up sur l’Agirc-Arrco

Après la campagne de pétitions auprès des députés organisée par Sauvegarde Retraites, beaucoup de nos membres nous ont fait parvenir les réponses des élus de la majorité. Analyse de cette collection de sophismes.

Premier constat : les élus de la majorité présidentielle utilisent un argumentaire-type utilisant les éléments de langage du gouvernement. C’est une tromperie. Leurs électeurs peuvent avoir l’impression que les élus ont sérieusement réfléchi à la question dont ils traitent, alors que ceux-ci – même lorsqu’ils font partie de la commission des Affaires sociales de l’Assemblée nationale, comme Frédéric Valletoux, député de Seine-et-Marne, ou Anne Bergantz, élue des Yvelines – se contentent de reproduire mot pour mot la communication du parti ou du ministère. Rares sont ceux qui s’en écartent et dans ce cas, ils émettent des bourdes montrant leur ignorance du sujet, comme Laure Miller, élue de la Marne et conseillère municipale de Reims, qui écrit – champagne ! – que les réserves Agirc-Arrco « sont de quinze mois ». En réalité, elles représentent neuf mois de paiement des pensions… soit 45 milliards d’euros de moins que ne le croit apparemment Mme Miller.

Analysons cet argumentaire officiel, indifféremment décliné sous les plumes de Frédéric Valletoux, Anne Bergantz, Laure Miller, mais aussi de Christophe Blanchet (député du Calvados), Nicolas Pacquot (Doubs), Charlotte Goetschy-Bolognese (Haut-Rhin), Xavier Batut (Seine-Maritime), ou Laurence Maillart-Méhaignerie (Ille-et-Vilaine).

  • Premier sophisme : selon ces élus, « l’équilibre " tous régimes " du système de retraite » serait « une priorité claire de la réforme conduite par le Gouvernement. Le principe d’une solidarité financière entre régimes a été clairement affiché dans la concertation sur la réforme des retraites au cycle 3 sur " L’Équilibre " en novembre 2022. »

En 2017, Emmanuel Macron avait annoncé une réforme qui rétablirait l’équité à la retraite entre les Français, ce qui aurait permis d’équilibrer les régimes spéciaux. Ce projet a été dénaturé dès la première mouture de réforme envisagée par le haut-commissaire Delevoye. Il n’en restait déjà plus rien dans la réforme adoptée en 2020 sous le gouvernement d’Edouard Philippe, puis abandonnée dès le début de l’épidémie de Covid-19. Et tout souci d’équité a disparu de la réforme Borne, qui maintient intacts les avantages retraite des régimes spéciaux de la fonction publique et prétend « éteindre » les régimes spéciaux de quelques entreprises ou organismes publics (RATP, IEFG, Banque de France, CESE…) *, moyennant une « clause du grand-père » qui les prolongera de facto jusqu’au siècle prochain. Or, ces régimes spéciaux sont tous structurellement déficitaires (ceux des fonctionnaires accusent à eux seuls un déficit d’environ 30 milliards d’euros) et plombent les comptes de l’Etat. Pour alléger sa facture, celui-ci veut faire payer sa facture aux régimes du secteur privé, en particulier le régime de retraite complémentaire des salariés du privé, AGIRC-ARRCO, en les contraignant à contribuer à « l’équilibre » de l’ensemble des régimes de retraite – ce qui reviendra à financer avec les cotisations des salariés du privé le coût exorbitant des avantages retraites de ses propres agents.

  • Deuxième bobard : « Le gouvernement a proposé aux partenaires sociaux d’organiser par une convention un transfert, destiné à assurer l’équilibre du système. »

Le gouvernement n’a pas « proposé » cette mesure, il veut l’imposer aux gestionnaires de l’Agirc-Arrco en l’inscrivant dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2024. L’article 9 du PLFSS précise d’ailleurs qu’à défaut d’une telle convention le gouvernement fixera par décret le montant de la contribution. Frédéric Valletoux en convient d’ailleurs : « Mais le Gouvernement pourrait être amené à définir, à défaut d’accord, dans le cadre du PLFSS, les modalités d’une participation financière de l’Agirc-Arrco au retour à l’équilibre général du système des retraites. » Autrement dit, si le régime du privé et ses affiliés n’acceptent pas de se laisser spolier de bon gré au bénéfice des régimes spéciaux du public, le pouvoir emploiera la manière forte pour les y contraindre. En fait de « proposition », il s’agit d’un chantage !

  • Les sophismes s’enchaînent : selon les députés macronistes « Il ne s’agit pas d’un pillage des caisses du privé », mais de tirer profit d’excédents résultant de la politique du gouvernement. On est prié de ne pas rire ! Ils ajoutent que « si les partenaires sociaux souhaitent financer de nouvelles dépenses (par exemple supprimer le « malus » qu’ils ont créé ou rendre plus dynamiques les règles d’indexation des pensions), cela doit se faire par d’autres mesures d’économies intégrées dans l’ANI (Accord National interprofessionnel) et non par le rendement de la réforme du Gouvernement. »

Or, les ressources de l’AGIRC-ARRCO proviennent toujours et seulement des cotisations que lui versent les salariés du privé et n’appartiennent donc en aucun cas à l’Etat. Leur utilisation pour alléger tant soit peu les efforts consentis depuis plus de trente ans par les affiliés à ce régime complémentaire** ne constitue pas une « dépense nouvelle ». Au contraire, leur captation par l’Etat pour les jeter dans le gouffre des déficits des régimes spéciaux de ses propres agents est complètement illégitime. C’est un vol !

*L’" extinction " du régime spécial de la SNCF s’applique aux agents recrutés depuis le 1er janvier 2020.

** Baisse des rendements du régime, hausse des cotisations, plafonnement des majorations familiales, revalorisations sous l’inflation, instauration d’un malus pour retarder l’âge du départ à la retraite, etc.


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