La réforme Borne ne rassure pas les créanciers de la France

Tout ça pour ça ! Malgré la promulgation de la loi de financement de la Sécurité sociale réformant les retraites, l’agence de notation internationale Fitch a dégradé la note de la France, ce qui traduit une perte de confiance des investisseurs et des créanciers à l’égard des capacités de notre pays à honorer sa dette.

On en arrive ainsi, in fine, à l’effet inverse de celui que recherchait le gouvernement en imposant le recul à 64 ans de l’âge légal de départ, qui voulait rassurer nos créanciers sur sa capacité à réformer, mais n’était pas du tout à la hauteur des enjeux. En outre, cette mesure a inutilement cristallisé les oppositions, puisqu’elle est redondante avec la loi Touraine, allongeant la durée de cotisation à 43 ans, qui entrera en application cinq ans plus tôt que prévu (génération née en 1968 au lieu de 1973).

L’agence Fitch estime que la réforme permettra de réaliser 17,7 milliards d’euros d’économie, ce qui est insuffisant au regard de l’importance croissante du déficit budgétaire, de la dépense et de la dette publiques, du ralentissement de la croissance, ainsi que de l’augmentation des taux d’intérêt, qui devrait se poursuivre au cours des prochaines années. La crédibilité du gouvernement souffre également du violent conflit social qui a secoué la France au cours des derniers mois.

Encore ces 17,7 milliards d’économie risquent-ils d’être considérablement rognés par les concessions accordées par le gouvernement aux syndicats, avec lesquels les négociations se poursuivent. Il n’est même pas exclu qu’à l’arrivée, le surcoût des compensations octroyées aux régimes spéciaux du secteur public ne soit pas supérieur aux gains théoriquement réalisés grâce à la réforme paramétrique, comme cela avait été le cas lors des réformes des régimes des IEG, de la RATP et de la SNCF, intervenues entre 2008 et 2014.

Les investisseurs et les agences de notation ne sont pas dupes des manœuvres du gouvernement. La dégradation de la note de la France, qui devrait être confirmée par une autre agence de notation (Standard and Poor’) au débit du mois de juin, s’inscrit dans une continuité (chute progressive de AAA en 2012, à AA- en 2023), qui risque d’engendrer une hausse des taux d’intérêt et, par conséquent, un alourdissement de la charge de la dette – et une amplification de l’effet « boule de neige » de celle-ci.

Le tout, pour une réforme a minima, qui apportera temporairement un peu d’oxygène aux régimes de retraite, sans rien régler durablement.


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