Le recul de l’âge de départ n’est pas l’essentiel de la réforme Borne
Dès la publication du contenu de la réforme Borne, au mois de janvier dernier, Sauvegarde Retraites avait souligné la redondance du recul de deux ans de l’âge de départ à la retraite avec l’allongement de la durée de cotisation, prévue par la réforme Touraine de 2014.
En effet, aux termes de la loi Touraine, le nombre de trimestres cotisés nécessaires à une personne partant à la retraite pour obtenir une pension à taux plein doit passer progressivement de 166 trimestres (41 ans et 6 mois) à 172 trimestres (43 ans)*. S’il manque des trimestres, non seulement la pension est calculée en fonction des seuls trimestres calculés, mais en outre une décote de 1,25 % par trimestre lui est appliquée, dans une limite maximale de 25 %. Pour échapper à cette sévère minoration, les personnes qui auront commencé à travailler à 21 ans seront donc conduites à travailler jusqu’à 64 ans. Quant à celles qui auront occupé un emploi plus tôt, elles bénéficieront le plus souvent des dispositifs de départ anticipé (pénibilité ou carrières longues).
Mesure paramétrique, le recul à 64 ans de l’âge de départ, objet de polémiques depuis qu’il est question de réformer une nouvelle fois les retraites, aura donc beaucoup moins d'effet qu’une autre mesure inscrite dans la réforme Borne et qui fait pourtant beaucoup moins parler d’elle : l’accélération sensible du calendrier de la réforme Touraine. C’est pourtant le noyau dur de la retraite, beaucoup plus susceptible d’engendrer des économies budgétaires.
La réforme Touraine prévoyait d’allonger la durée de cotisation nécessaire pour remplir les conditions du taux plein à 167 trimestres (au lieu de 166 précédemment) pour les natifs de 1958 à 1960 168 trimestres pour les personnes nées de 1961 à 1963 compris 169 pour celles nées de 1964 à 1966… etc., jusqu’aux natifs de 1973, première génération astreinte à cotiser 172 trimestres pour remplir les conditions du taux plein.
Avec la réforme Borne, les personnes nées en septembre 1961 sont déjà tenues de cotiser 169 trimestres la génération de 1963, 170 trimestres et les 172 trimestres sont atteints dès celle née en 1965, soit huit ans plus tôt que dans la réforme Touraine. Pourquoi cette accélération du calendrier paraît-elle moins déranger les syndicats que le recul de l'âge de départ ? Sans doute, parce qu’elle est plus difficile à expliquer et se prête donc moins à la communication de masse.
*Sauf pour les personnes qui liquident leurs droits à partir de l’âge pivot, fixé à 67 ans. Dans ce cas, la pension est calculée sur la base des trimestres cotisés, mais la décote ne s’applique plus.