Syndicats : une posture de plus en plus irresponsable

Si les syndicats tiennent le haut du pavé dans la vocifération, le déni et la victimisation, ils sont bien avares de propositions concrètes. Et quand il y en a, il s’agit de revendications visant « avant tout » à défendre… les régimes spéciaux.

Si le projet de loi sur les retraites a été définitivement adopté par le Parlement, sous réserve de la décision du Conseil constitutionnel, attendue le 14 avril prochain, le gouvernement ne semble pas pour autant sorti de l’auberge. La pression de la rue est à son maximum et l’exécutif perd pied dans une séquence médiatique désastreuse pour son image et sa crédibilité. Du côté des syndicats, le grand théâtre se poursuit sur fond de manifestations : vociférations, déni et victimisation semblent constituer le triptyque syndical du moment, tandis que la violence s’invite dans les cortèges, sans même être formellement condamnée par les organisateurs. Quid des propositions ? Rien… ou presque. La CFDT, par la voix de son secrétaire générale Laurent Berger, a beau proposer une « médiation » au gouvernement, aucune alternative sérieuse au projet de loi tant décrié n’est proposée sur le fond.

Une défense en règle des privilèges des fonctionnaires

On a connu la CFDT plus ambitieuse, quand elle prônait une réforme systémique en 2019. Elle rejoint aujourd’hui le camp du déni, proposant notamment, sans grande imagination, une hausse des cotisations et un florilège de mesures démagogiques non financées. Mais surtout, en bonne place dans ses dernières revendications, figure une défense en règle… du régime spécial de la fonction publique. Nous y voilà… Elle réclame à grands cris « des mesures pour les séniors et la prise en compte de la pénibilité » dans la fonction publique et elle affirme sans complexe : « Avant tout, en ce qui concerne la règle des 6 derniers mois, la CFDT est très claire : elle s’opposera à toute remise en cause de cette mesure. » On appréciera le « avant tout »… Les choses sont dites : les salariés du privé ont beau voir leur pension calculée sur l’ensemble de la carrière, la centrale syndicale tient mordicus à rester aux 6 derniers mois pour les fonctionnaires. Autre point sensible : la fameuse catégorie dite « active » de la fonction publique, qui permet de partir à 52 ou 57 ans. Là encore, « touche pas au grisbi » : « La CFDT revendique le maintien du dispositif dit de ‘la catégorie, tout en y intégrant des améliorations. » Vous lisez bien : des « améliorations »… Il leur faudrait encore plus…

Cette posture est particulièrement irresponsable. L’augmentation des cotisations ? Ce serait indolore pour les fonctionnaires, toute hausse de cotisations étant compensée par un relèvement du traitement (au bout du compte, c’est toujours le contribuable qui paie). Et pour les reste, la CFDT défend les bastions des agents publics, lesquels fournissent le gros des adhérents syndicaux, des grévistes et des manifestants. Le sommet de l’hypocrisie est que la centrale affirme que toutes ces "propositions" ont pour objectif de « renforcer la solidarité de notre système » (sic). Une solidarité à sens unique : celle des salariés et indépendants du privé envers les agents publics. Les premiers paient, les seconds palpent.

Ces syndicats ne présentent ni créativité ni légitimité. Ils prétendent représenter le peuple et vouloir faire appel à celui-ci. Gageons que si la question était posée, l’écrasante majorité des Français approuverait la suppression des régimes spéciaux de fonctionnaires, défendus bec et ongles par des syndicats totalement centrés sur eux-mêmes. À quand une réforme des syndicats ?

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