L'illusion du « droit opposable à la retraite »

En annonçant un "droit opposable à la retraite", Marisol Touraine jette un rideau de fumée sur l'extraordinaire complexité du système de retraite

Le gouvernement aime décidément les effets d'annonce : voici que Marisol Touraine a informé l'Assemblée nationale qu'elle entendait créer par décret un « droit opposable à la retraite du régime général ». S’agit-il d’un nouveau « droit à la retraite » de portée générale qui, jusqu’ici, n’existait pas ? Non pas : il s’agit de garantir le déblocage automatique de la pension quatre mois après le dépôt d’un dossier complet !
« Concrètement, dès la rentrée prochaine, et partout en France, tout dossier complet de retraite, déposé quatre mois avant la date prévue de départ à la retraite, devra être traité dans les temps. Si ce n'est pas le cas, les caisses commenceront par verser automatiquement le montant rapidement estimé de la retraite afin d'éviter des situations où les retraités se retrouvent sans aucune ressource. »
Une durée de quatre mois, soit un tiers d’année, semble en effet déjà longue pour traiter un dossier ! Pendant quatre mois, le retraité doit continuer à payer son loyer, ses factures d’eau et d’électricité, parfois ses impôts, se nourrir, et calmer son banquier…
Sont prévues « des mesures de soutien aux caisses » pour qu’elles puissent être « au rendez-vous de cette obligation », occultant la raison principale des dysfonctionnements du système de retraite : son extraordinaire complexité. Marisol Touraine préfère poser une nouvelle rustine sur les fuites récurrentes de l’usine à gaz de la réglementation, complexifiée par les réformes successives, plutôt que simplifier et réformer le système en profondeur, dans le sens de l’équité et de la simplicité.
Il est en effet douteux qu’il suffise « d’alléger certaines procédures de liquidation » et de « renforcer les moyens de gestion » pour honorer la promesse « opposable » du gouvernement. Il ne s’agit, en réalité, que d’un prétexte qui jette un rideau de fumée sur l’essentiel et reviendra, une fois encore, à créer une nouvelle "usine à gaz" dans le régime général ; sans parler des régimes complémentaires, non concernés par cette mesure, mais qui ne sont pas toujours en reste en matière de complexité.

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