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Réforme de leur caisse de retraite complémentaire (CNBF) : un " Madoff "chez les avocats

On sacrifie les jeunes générations pour garantir les avantages acquis des anciens. Une fois de plus, la répartition s’apparente à un « Madoff ».

Un arrêté, établi par Caisse Nationale des Barreaux Français (CNBF) et publié au Journal officiel par un décret du 2 juillet, réforme la retraite complémentaire des avocats. Il ne plaide pas en faveur de la « solidarité » de cette profession.


Le régime de retraite complémentaire des avocats a été rendu obligatoire voilà 35 ans, en 1979. Il prévoyait deux taux de cotisation, correspondant à deux tranches de revenus :

- 3,11 % pour la tranche inférieure à 41 674 € (en 2014)

- 6,21 % pour la tranche supérieure.

En outre, depuis 1987, les avocats dont les revenus se situaient dans la deuxième tranche avaient la possibilité, s’ils le souhaitaient, de cotiser davantage (+ 2,69 %, plus 6,62 % ou 9,52 % selon leur choix) pour acquérir plus de points.

Cette retraite complémentaire a pour caractéristique, insolite pour un régime de profession libérale, d’avoir fonctionné par répartition et par points dès sa création (1). En répartition, en effet, les cotisations des actifs alimentent les pensions des retraités. En l’occurrence, lors de la mise en place du régime, des points retraite furent attribués gratuitement à des avocats sur le point de prendre leur retraite, qui n’avaient pas cotisé.

La réforme en cours, qui s’appliquera progressivement à partir du 1er janvier 2015 jusqu’en 2029, prévoit de remplacer à terme les tranches actuelles par cinq tranches, avec des taux de cotisations obligatoires de 6 %, 11,6 %, 13,7 %, 15,8 % et 17,9 % selon les revenus. Dans tous les cas, le taux double donc ou peu s’en faut. Et les sur-cotisations optionnelles disparaissent, le caractère obligatoire prévalant désormais.

En outre, il est prévu que le rendement soit réduit et ne puisse pas dépasser 7,5 % en 2029, contre 10 % actuellement.

Pour justifier ces changements, la CNBF fait notamment valoir :

- que « le rapport cotisants/retraités est moins bon qu’à la création du régime », en raison de l’augmentation du nombre des retraités et de l’allongement de l’espérance de vie

- que les pouvoirs publics risquaient de supprimer les avantages fiscaux et sociaux du régime, et que les options intéresseraient donc moins les jeunes générations.


Au premier argument, on peut objecter que le régime des avocats bénéficie d’une démographie que peuvent lui envier tous les autres régimes, avec 57 669 cotisants pour 13 029 bénéficiaires en 2014 – soit plus de 4,4 pour 1. En comparaison, le rapport est de 1,3 pour 1 à l’Arrco et de 2,1 pour 1 à l’Agirc.


Quant au deuxième argument, la Caisse avoue cyniquement qu’il s’agit d’obliger les jeunes générations à rentrer dans un système dont elles se détourneraient sans cette contrainte ! Elle ne précise d’ailleurs pas que la réforme annoncée s’ajoute à la fermeture en août 2008 de l’Avocapi, régime facultatif d’épargne retraite par capitalisation viagère, qui était plus intéressant pour les nouveaux avocats.


En réalité, la réforme vise surtout à « pérenniser et consolider la CNBF et donc son régime ». Reste à savoir à qui elle profite : sans aucun doute, les avocats entrés en 1979, principaux bénéficiaires, puisqu’elle « pérennise » leurs avantages acquis.

Une partie de leurs confrères actuellement en exercice n’en souffrira pas trop, en raison de l’étalement des mesures sur 15 ans.


En revanche, les « nouveaux entrants » en feront les frais, puisqu’en somme on les oblige à cotiser beaucoup plus, pour un rendement moindre, à un régime qui, sans la contrainte, ne les intéresserait pas.


En somme, les anciennes générations font payer leurs avantages par les plus jeunes. Le régime complémentaire des avocats illustre ainsi la proche parenté du principe de la répartition avec le système de Ponzi – une escroquerie « à la Madoff ».

La plupart du temps, les régimes par répartition ont d’abord fonctionné en capitalisation et ne sont passés en répartition qu’à la faveur de circonstances extraordinaires, comme ce fut le cas du régime général en 1941.


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