Compte-pénibilité : un système à la « Madoff »
Présenté comme une mesure phare de la nouvelle non-réforme des retraites, le « compte personnel de prévention de la pénibilité » est une nouvelle « usine à gaz ».
La nouvelle loi prévoit d’attribuer, à tous les salariés exposés à des tâches pénibles ou dangereuses, un compte individuel sur lequel ils cumuleront des points qui leur ouvriront de nouveaux droits (formation de reconversion, retraite progressive ou retraite anticipée).
Ce sont les entreprises qui sont appelées à financer, dès 2015, ces nouveaux droits par une hausse de leurs cotisations. Mais ces sommes ne seront pas épargnées sur un compte pour financer plus tard les prestations liées à la pénibilité : en effet, dans un système par répartition, les cotisations prélevées aujourd’hui sur les actifs servent à payer aujourd’hui les pensions des retraités.
- Première arnaque : même s’il est arbitrairement prévu de doubler les points octroyés aux salariés proches de l’âge de la retraite, le nouveau système ne se mettra en route que progressivement. Les cotisations versées par les entreprises alimenteront donc les caisses de retraite et serviront, au moins dans un premier temps, à limiter le déficit actuel – alors que le financement des droits acquis au titre de la pénibilité (2,5 milliards d’euros en 2040) sera en grande partie reporté sur la génération suivante.
- Deuxième arnaque : par ailleurs, il est prévu que les entreprises obtiendront, pour les aider à faire face aux nouveaux prélèvements, une contrepartie correspondant à la hausse de leurs cotisations. Selon Marisol Touraine, cette contrepartie qui ne sera financée « ni par une hausse de la Tva, ni par une augmentation de la CSG », mais « prise en compte sur le budget de l’Etat ». Or ce budget, lui-même nourri par l’impôt, est déficitaire et creuse la dette publique…
Pour résumer, les contribuables seront donc appelés à aider les entreprises à s’acquitter d’une hausse des cotisations employeurs destinée à financer un compte pénibilité par points, mais qui sera utilisée dans un premier temps pour résorber partiellement le déficit endémique d’un système de retraite toujours pas réformé.
Auprès de l’État français, Madoff (1) est un honnête homme !
(1) Financier américain, Bernard Madoff a été condamné pour avoir monté une escroquerie géante reposant sur le système de Ponzi, qui consiste à rémunérer les investissements des clients plus anciens avec les versements des nouveaux entrants. Un type d’opération qui n’a plus de secret pour l’État français…
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- départs anticipés
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