Réforme 2008 : un nouveau rendez-vous manqué !
publié le 03-04-2008
« Les Français sont très attachés à leur système de retraite par répartition ». Ainsi débute le communiqué du ministère du Travail concernant le fameux « Rendez-vous 2008 » sur les retraites...
Le message est clair : ce couplet que l’on nous ressert pour la énième fois signifie simplement que le gouvernement refuse encore toute réforme structurelle du système en vigueur, au risque d’un effondrement à venir des prestations.
Autrement dit, le gouvernement actuel, aussi aveugle que les précédents, persiste dans cette dérive bureaucratique qui consiste, non pas à tenter de sauvegarder les retraites des affiliés, mais à voler au secours d’un système à bout de souffle, dans l’unique fin de préserver les intérêts de ceux qui le gèrent et en tirent un profit personnel. Dans ce contexte, les mesures proposées par le gouvernement sont déjà éculées et souvent dérisoires quant elles ne relèvent pas carrément du bidouillage comptable.
Les plats réchauffés
Premier constat : la mesure phare proposée par le gouvernement n’a rien d’innovant. L’allongement de la durée d’activité de 40 à 41 ans était déjà prévu par la loi Fillon de 2003. De même, le principe de garantir une retraite égale à 85 % du SMIC pour ceux qui ont été smicards toute leur vie, figurait déjà à l’article 4 de cette même loi.
Enfin, le dispositif des départs anticipés pour carrières longues – grand fiasco de la « réforme » 2003 dont le coût est évalué par le professeur Bichot à 30 milliards d’euros sur 15 ans ! – est reconduit in extenso ! Pourquoi changer les méthodes qui gagnent ? Et, comment faire du neuf avec… du vieux !
Les amuse-gueules
Dans la rubrique « nouveautés », les mesures ne sont pas moins affligeantes. D’autant plus qu’il s’agit exclusivement de dépenses, sans que l’on ne sache ni par qui, ni comment elles vont être financées !
- 200 € versés aux retraités les plus modestes
- Revalorisation du minimum vieillesse de 5 % par an jusqu’en 2012
- Augmentation progressive du taux de réversion de 54 % à 60 % dans le régime général des salariés du privé (CNAV).
Au surplus, cette dernière mesure est un véritable trompe l’oeil puisque l’injustice de la réversion qui frappe les seuls retraités du privé n’est pas tant le taux de réversion (54 %, c’est pas mal ?) que l’existence du plafond (1 463 € par mois) dont on déduit, sans pitié, toutes les ressources personnelles du conjoint survivant jusqu’à la suppression pure et simple de tout droit de réversion. 60 % de 0 € équivalent à 54 % de 0 € !
De mesures de pacotilles en cadeaux électoraux, le gouvernement est évidemment loin de pouvoir sauver le système de la faillite. Pour s’en sortir, il présente une solution à court terme : « taper » dans les caisses de l’Unedic et dans celle de la branche famille (CAF), et une solution à long terme qui passe par une politique interventionniste et coercitive de relance de l’emploi des seniors.
Le pillage de la CNAF et de l’UNEDIC
Pour boucler les prochains exercices qui s’annoncent de plus en plus ruineux, le gouvernement convoite avec appétit les excédents annoncés de l’assurance chômage et de la CAF.
Pour la CAF, le raisonnement est simple : « il peut sembler logique », estime le gouvernement, que les avantages familiaux liés à la retraite soient pris en charge par les caisses d’allocations familiales. Seul « hic ! », c’est déjà le cas… Le gouvernement Balladur y a déjà pensé en 1993 et le tour de passe-passe dure depuis 15 ans !
Pour l’UNEDIC, le raisonnement est encore plus simple : « grâce à l’amélioration du marché de l’emploi », on peut baisser les cotisations UNEDIC et augmenter, en contrepartie, les cotisations retraite sans qu’il y ait de charges supplémentaires pour les salariés et les entreprises.
Premier « hic ! », l’UNEDIC a encore sa propre dette à résorber : 10 milliards d’euros. Second « hic ! », le chômage a tendance à repartir à la hausse…
Emploi des seniors : après la carotte, le bâton
Suite aux échecs à répétition des gouvernements précédents pour relancer l’emploi des seniors, nos dirigeants veulent tenter un ultime baroud d’honneur. Mais, cette fois il n’est plus question de mesures purement incitatives… L’heure est aux sanctions !
Il est fortement question de contraindre les entreprises à employer coûte que coûte des salariés « âgés ». Mesure très contestable lorsque l’on se rappelle les lois Aubry de la fin des années 1990 qui obligeaient les entreprises à embaucher des… jeunes de 18-25 ans et à mettre en préretraite forcée les 50-54 ans. Avec les résultats que l’on connaît : un taux de chômage record chez les jeunes par rapport autres pays de l’OCDE et un taux d’emploi des seniors parmi les plus bas.