Un cadeau électoral aux fonctionnaires
À moins de trois mois de l’élection présidentielle, voici venue l’époque des petits cadeaux entre amis. Le gouvernement vient d’en faire un beau aux syndicats de la fonction publique, en bouclant avec eux, le 26 novembre, la négociation sur le futur régime de complémentaire santé des fonctionnaires, autrement dit, la mutuelle collective obligatoire de la fonction publique.
Comme le souligne le site Internet de l’argus de l’assurance, « les sept syndicats représentatifs ont signé le texte, une situation extrêmement rare, ce n’est que la troisième fois dans l’histoire des négociations de fonctionnaires. » Et pour cause ! Avant même que l’accord soit signé, le ministre de la Fonction publique, Amélie de Montchalin, affirmait avoir répondu à « un très grand nombre [des] sollicitations » des organisations syndicales. Celles-ci auraient été bien folles de ne pas accepter une pareille aubaine !
De l’aveu du ministre, l’accord prévoit un « panier de soins plus ambitieux » et des solidarités « intergénérationnelles » et « familiales » « beaucoup plus importantes » que dans le privé. La CFDT en convient dans une déclaration du 27 janvier : « ce dispositif de solidarité est supérieur à celui prévu par la loi Évin dans le secteur privé. » Voilà une « solidarité » cantonnée à l’entre-soi…
Quant au financement de ces largesses (900 millions d’euros par an), il est prévu que l’employeur public, autrement dit l’Etat, prendra en charge la moitié de la « cotisation d’équilibre » de 60 euros par mois qui sera versée aux organismes complémentaires, mutuelles et autres. Reste 30 euros, théoriquement à la charge des fonctionnaires (1) – mais il y a loin de la théorie à la pratique. Les cotisations des agents de l’Etat sont, comme on sait, fictives. En réalité, leur traitement net ne diminuera pas d’un centime et la totalité de la facture incombera à l’Etat – c’est-à-dire, in fine, au contribuable, qui paiera ces nouveaux privilèges de la fonction publique.
2,5 millions de fonctionnaires de l’Etat en activité profiteront de ces largesses, mais les retraités de la fonction publique ne sont pas oubliés. À l’inverse de ceux du privé, ils pourront bénéficier des mêmes prestations que les fonctionnaires en activité, avec des aménagements profitables : à la demande des syndicats, Amélie de Montchalin a ainsi accepté de limiter à 75 ans (2) l’âge à partir duquel leurs cotisations n’augmenteront plus et de baisser le plafond du montant des cotisations. L’accord prévoit en outre que les cotisations des retraités pourront être en partie prises en charge en fonction de leurs ressources et qu’un fonds d’aide sera créé à leur bénéfice, alimenté par une cotisation fixée à 2 % des cotisations acquittées par les fonctionnaires en activité. Autrement dit, l’État – donc le contribuable – casquera encore une fois.
Cet accord commencera à s’appliquer à partir de 2024, en commençant par la fonction publique d’Etat, et devra être pleinement réalisé en 2026. Il ne s’agit toutefois que d’une base, qui pourra être améliorée par chacun des ministères lors des négociations qui seront engagées avec les syndicats au cours des prochains mois. Comme le dit si bien un syndicaliste cité par Les Echos, « c’est maintenant que tout commence ».
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