Les régimes spéciaux de retraite

Les régimes spéciaux de retraite sont les régimes dont la création est antérieure à celle du régime général de sécurité sociale (1945) et qui ont tenu à garder leurs spécificités. Il s’agit, essentiellement, des régimes de retraite du secteur public ou parapublic. Les prestations de ces régimes sont souvent bien meilleures que celles des régimes de droit commun, en particulier celles du régime général des salariés du privé : taux de remplacement garanti, mode avantageux de calcul de la pension, possibilité de départs précoces à la retraite, réversion sans conditions, etc.

Actuellement, il reste au moins dix-huit régimes spéciaux en vigueur1 :

- Fonctionnaires civils de l'Etat

- Fonctionnaires militaires

- Fonctionnaires territoriaux et hospitaliers (CNRACL)

- Ouvriers d’Etat (FSPOEIE),

- SNCF,

- Industries électriques et gazières (IEG),

- RATP,

- Marins (ENIM),

- Mineurs (CANSSM),

- Banque de France,

- Opéra national de Paris,

- Comédie française

- Clercs et employés de notaires (CRPCEN)

- Elus de l'Assemblée nationale

- Fonctionnaires de l'Assemblée nationale

- Elus du Sénat

- Fonctionnaires du Sénat

- Conseil économique, social et environnemental (Cese).

Le poids des régimes spéciaux du secteur public en 2022

Nombre d’actifs affiliés

4,5 millions

dont 4,2 millions de fonctionnaires de l’Etat, des collectivités locales et des hôpitaux, et ouvriers de l’Etat.

Nombre de bénéficiaires

4,4 millions

dont 3,6 millions de fonctionnaires de l’Etat, des collectivités locales et des hôpitaux, et ouvriers de l’Etat.

Charges

103,6 milliards d’euros

*Non compris les régimes de retraite des députés, des sénateurs et des membres du Conseil économique, social et environnemental (CESE).

Source : Commission des comptes de la Sécurité sociale

Au cours de ces dernières années, certains de ces régimes spéciaux ont été prétendument « fermés », comme celui de la SNCF en 2020, ceux des IEG, de la RATP, de la Banque de France et du CESE en septembre 2023 [1]. Toutefois, ces fermetures ne deviendront effectives qu’au siècle prochain en raison de la « clause du grand-père » qui s’applique aux agents et salariés embauchés avant le 1er janvier 2020 pour la SNCF et le 1er septembre 2023 pour les autres régimes. L’Etat a cependant pris prétexte de ces « fermetures », dans un premier temps pour faire verser une soulte au régime spécial de la SNCF par les régimes de base et complémentaire des salariés du privé (Cnav et Agirc-Arrco), puis pour faire de la Cnav « l’équilibreur en dernier ressort » de ces différents régimes spéciaux, au profit desquels est également prélevée une contribution de l’Agirc-Arrco. Par ce biais, l’Etat fait financer par l’ensemble des cotisants aux régimes du privé les privilèges dont continuent à bénéficier, au titre de la « clause du grand-père », les affiliés aux régimes spéciaux.

Par ailleurs, les régimes de retraite des fonctionnaires – qui sont de loin les plus importants des régimes spéciaux, bien que la communication de l’Etat s’efforce de ne pas les présenter comme tels –, ne sont pas concernés par ces « fermetures ».

Pourtant, de plus en plus de voix se font entendre, comme celles du haut-commissaire au plan François Bayrou, de l’ex-inspecteur général des impôts Jean-Pascal Beaufret ou du professeur Rémi Pellet, pour désigner ces régimes spéciaux et particulièrement ceux de la Fonction publique comme les principaux responsables du déficit global des retraites (70 milliards d’euros).

Selon Jean-Pascal Beaufret, l’Etat verse une subvention annuelle de l’ordre de 40 milliards d’euros pour équilibrer le régime spécial des fonctionnaires de l’Etat – aux frais de l’ensemble des contribuables.

Ce chiffre est corroboré par un rapport de la Commission des finances du Sénat publié en annexe du projet de loi de finances pour 2024, qui fait état d’une subvention d’équilibre fictive de 39 milliards d’euros, auxquels s’ajoutent 10 milliards d’euros de cotisations patronales, elles aussi « fictives ».

En outre, les collectivités locales et les hôpitaux publics subventionnent la CNRACL (régime de retraite des fonctionnaires locaux et hospitaliers) à hauteur de 7 milliards d’euros, et l’Etat verse 7 autres milliards d’euros de subventions pour « équilibrer » les budgets des autres régimes spéciaux (SNCF, RATP, mines, ouvriers de l’Etat, etc.)

[1] Le régime spécial des clercs de notaire a également été fermé, mais à la différence des régimes spéciaux du secteur publique, il n’est pas à la charge des contribuables.

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