Hold-up sur nos retraites !
publié le 21-07-2009
L’Etat s’apprête à piller nos caisses de retraite pour financer le régime spécial de la RATP.
Le dossier était enterré depuis trois longues années mais voilà qu’il resurgit : le régime spécial de la RATP est en passe d’être « adossé » au régime général des salariés du privé (CNAV).
« Adossé », ce terme abscons mérite une explication : fruit de la cogitation de quelques technocrates zélés, il signifie que le régime spécial de la RATP va désormais puiser directement ses racines financières dans le tronc commun : la CNAV. Tout en gardant son autonomie et ses spécificités : treizième mois de retraite, trimestres gratuits, départs anticipés (dès 50 ou 55 ans), calcul de la pension sur les six derniers mois, niveau de pension garanti, etc… De quoi profiter du « beurre et l’argent du beurre ».
Ce qui, en biologie, porte le nom de « parasite » (selon le Petit Larousse : « Être vivant qui puise les substances qui lui sont nécessaires dans ou sur l’organisme d’un autre ») s’appelle donc « adossement » lorsqu’il s’agit de retraite. Tout n’est qu’une question de sémantique…
Oh ! Evidemment, les instigateurs de cet « adossement » jurent, par leurs grands dieux, que l’opération va être neutre financièrement et qu’il n’en coûtera pas un centime d’euro aux salariés du secteur privé. La CNAV récupérera les cotisations retraite de la RATP et une « soulte » lui sera également versée pour compenser le déficit démographique du régime spécial (1 actif pour 1 retraité…).
Un peu grosse la ficelle… Ce mensonge ne résiste pas à l’analyse des faits et, ce, pour au moins deux bonnes raisons :
1 – Si l’opération « adossement » n’a pas pour objectif de faire prendre en charge par la CNAV une partie des dépenses retraite du régime spécial de la RATP, quelle est sa finalité ? Créer une nouvelle usine à gaz dans un système de retraite à bout de souffle qui souffre déjà d’hyper complexité ? Absurde !
2 – Il est prévu que la soulte, que la RATP doit verser à la CNAV pour l’indemniser de l’opération, soit payée non pas par la régie (elle est à sec…) mais par l’Etat – donc le contribuable (vous et moi…) -! En somme, l’Etat, sans vergogne, nous propose de nous indemniser nous-mêmes du hold-up qu’il va commettre pour financer les retraites spéciales des agents de la RATP. Il fallait y penser…
Dans ces conditions, comment ose-t-on prétendre que l’opération sera neutre !
Enfin, rafraîchissons-nous un peu la mémoire. Une opération « adossement » a déjà eu lieu dans un passé récent. C’était en 2004. Ainsi, à l’instar de ce qui est aujourd’hui prévu pour la RATP, le régime de retraite d’EDF et de GDF est invité, depuis cinq ans, à puiser allègrement dans les caisses du régime général des salariés du privé et il ne s’en prive pas. Or, dans cette première opération, deux anomalies de taille sont à dénoncer :
1 – Aucune « clause de revoyure » n’a été prévue (pourtant, ce n’est pas faute de l’avoir demandée !) au cas où le montant de la « soulte » compensatrice due par EDF et GDF à la CNAV s’avérerait, à l’avenir, sous-estimé.
Or, l’estimation de cette « soulte » a été réalisée par Bercy qui, pour l’occasion, se trouve juge et partie… Au surplus, aucune contre-expertise n’a été réalisée !
Question : à votre avis, qui, au bout du compte, sortira gagnant de l’opération : l’Etat, EDF et GDF ou la CNAV ?
2 – Depuis cet adossement, EDF et GDF reversent leurs cotisations retraite à la CNAV. Néanmoins, dans ses rapports sur la Sécurité sociale de 2007, 2008 et 2009, la Cour des comptes est formelle : il est impossible de certifier que les cotisations dues par EDF et GDF à la CNAV sont versées dans leur totalité.
Seconde question : à votre avis, le compte y est-il ?
Dans ce contexte, après l’ « adossement » du régime EDF et GDF au régime général des salariés du privé, il est hors de question que celui de la RATP vienne lui aussi grossir les rangs des parasites. Compte-tenu des avantages consentis aux agents de la régie, cette opération serait socialement inique et financièrement assassine. Pour rappel, le déficit prévu pour la CNAV, en 2009, atteint déjà 7,7 milliards d’euros !