Le COR, plus de vingt ans de désinformation d’Etat

L’institut Molinari publie une étude remarquable, montrant que le Conseil d’Orientation des Retraites a occulté 884 milliards de déficit des régimes de retraites du secteur du public au cours des vingt dernières années !

La guéguerre commencée au mois de janvier entre le gouvernement et le Conseil d’Orientation des Retraites (COR), qui est pourtant un service attaché au Premier ministre, se poursuit. En pleine polémique sur le projet de réforme des retraites, le président de cet organisme public, Pierre-Louis Bras, avait déclaré devant la commission des finances de l’Assemblée nationale que les dépenses de retraite étaient « relativement maîtrisées », fournissant ainsi un argument aux adversaires de la réforme. Elisabeth Borne avait alors critiqué – en "privé" – les scénarios du COR. La publication par ce dernier, le 22 juin, de son rapport annuel 2023, ranime la querelle. À en croire le COR, le solde du système de retraite serait positif, de 4,4 milliards d’euros en 2022 et de 3,6 milliards en 2023 mais il « resterait négatif à moyen terme dans l’ensemble des scénarios » et serait même durablement déficitaire « dans le cadre du scénario retenu pour référence par le gouvernement pour la présentation de la réforme 2023 ». Celle-ci ne permettrait donc pas de restaurer l’équilibre budgétaire des retraites, comme le gouvernement l’avait annoncé… Du coup, Bruno Le Maire, reproche au COR de modifier ses évaluations « tous les six mois » – autrement dit, de n’être pas crédible.

L’œil dilaté, le ministre de l’Economie feint de découvrir la lune ! Voilà longtemps que Sauvegarde Retraites met en garde contre les « évaluations et perspectives » fantaisistes du Conseil d’Orientation des Retraites – qui, jusqu’à présent, servaient la communication de l’Etat et des gouvernements successifs, en masquant systématiquement la réalité des déficits des régimes de retraite du secteur public.

Le COR a occulté 94 % du déficit, provenant des régimes du public !

C’est ce que démontre avec précision une excellente étude que vient de publier l’institut Molinari sous le titre : « Retraites, mécomptes et déficits publics. Quand un baromètre officiel sous-évalué nuit au débat public depuis plus de 20 ans ». Nicolas Marques, Directeur général de l’institut, a calculé que « depuis 2022, le COR a occulté 94 % du déficit des retraites », soit 884 milliards d’euros ! Pour donner une idée de l’importance de cette occultation, l’auteur remarque qu’elle représente 46 % du déficit des administrations. Et ce trou considérable provient des régimes de retraite publics subventionnés par l’Etat : sur vingt ans, 144 milliards au profit des autres régimes spéciaux (SNCF, RATP…) et des ouvriers de l’Etat 107 milliards pour les retraites des fonctionnaires des collectivités locales et des hôpitaux (CNRACL) 633 milliards sur vingt ans au titre de celles des fonctionnaires d’Etat ! Concernant ces dernières, Nicolas Marques constate qu’en 2020, la somme des cotisations retraites destinées à financer les pensions des fonctionnaires d’Etat retraités était supérieure à celle des traitements indiciaires nets perçus par les actifs !

Pour calculer les déficits réels des régimes du secteur public, l’auteur s’est appuyé sur les taux de cotisations employeur dans le public (74,3 % du traitement indiciaire pour les fonctionnaires civils de l’Etat, 126 % pour les militaires), très supérieures aux cotisations patronales en usage dans le privé (16,5 % du salaire brut). Dans le régime des collectivités locale et des hôpitaux, la différence est moindre, mais représente encore une surcotisation de 11 % par rapport au privé, ce qui reste considérable.

Nicolas Marques montre que ces surcotisations constituent des subventions d’équilibre déguisées, mais le COR ne les prend pourtant pas en compte, malgré leur énormité : les deux tiers des retraites des fonctionnaires d’Etat ont ainsi été financées par une subvention masquée de l’Etat employeur. Le COR ne tient pas davantage compte des subventions d’équilibre très importantes versées par l’Etat à la CNRACL et aux autres régimes spéciaux.

En revanche, les régimes de la Banque de France et du Sénat se financent grâce à la capitalisation collective – ce qui devrait faire réfléchir nos dirigeants sur les défauts et les risques du « tout répartition ».

Le dernier rapport annuel du COR, en date du 22 juin, montre qu’il persiste dans ses mauvaises habitudes et n’est pas parti pour s’amender, puisqu’il occulte encore 55 milliards d’euros de déficits au titre de 2022, souligne Nicolas Marques. De sorte qu’au lieu des 4,4 milliards d’excédent allégués par le COR, le solde réel était déficitaire de 50 milliards d’euros !

Cette brillante étude de Nicolas Marques peut être consultée sur le site de l’institut Molinari : https://www.institutmolinari.org/2023/06/20/retraites-mecomptes-et-deficits-publics-2e-edition/


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