Le pouvoir dissimule le déficit par la politique des vases communicants
Comme l’a très justement dit le ministre du Travail, Olivier Dussopt, « améliorer le système [de retraite] sans l’équilibrer financièrement serait irresponsable ». Pourtant, l’objectif affiché de résorber le déficit des retraites, constate le quotidien économique Les Échos, « est déjà sujet à caution ». C’est un euphémisme ! En réalité, il est d’avance condamné, non seulement en raison du maintien des régimes spéciaux de la fonction publique, dont le déficit structurel est évalué à 30 milliards d’euros au minimum, mais aussi, par les coûteuses concessions consenties par le gouvernement lors des débats parlementaires.
Pour faire face aux nouvelles dépenses engendrées par ces concessions, le ministre du Travail affirme qu’il n’est pas « interdit » de dégager de nouvelles recettes mais, en fait de " recettes ", celles du gouvernement ressortent surtout de la cuisine politicienne ordinaire. Ainsi Olivier Dussopt envisage-t-il, pour "financer" les mesures prévues, de siphonner en faveur des retraites d’autres branches de la Sécurité sociale, à savoir :
- la branche Famille, déjà sérieusement pillée par le passé
- la branche Autonomie, pour financer la création d’une assurance vieillesse des aidants familiaux
- et surtout, la branche Accidents du travail – Maladies professionnelles (ATMP). Réputée « très excédentaire » par Olivier Dussopt, celleci serait ponctionnée à hauteur de 700 millions d’euros au total et les cotisations qui lui sont attribuées baisseraient, tandis que celles de la branche retraite augmenteraient au contraire. Cette manipulation, que Les Echos qualifie de « tour de passepasse budgétaire », relève d’une politique des vases communicants que l’État pratique depuis longtemps.
D’autres expédients, qui se traduisent par la hausse des prélèvements obligatoires, sont également prévus pour financer les dépenses : la facture de l’élargissement du dispositif de retraite anticipée pour carrières longues, voulues par les parlementaires LR, pourrait ainsi être réglée à la fois par le siphonnage de la branche AT-MP et par la taxation des ruptures conventionnelles – au risque d’entraver davantage la mobilité professionnelle.
En outre, toujours selon Les Echos, « l’exécutif a promis que l’État compenserait la mise à contribution des collectivités locales et des hôpitaux, dont les cotisations retraites vont augmenter (à hauteur de 700 millions) ». Or, quand l’État « compense », c’est toujours avec un argent tiré des poches des contribuables !
En fin de compte (provisoire), « la facture des mesures assumées par l’État et par les autres branches de la Sécurité sociale [ce qui revient au même, ndlr…] dépassera sans doute la barre des 3 milliards d’euros », concluent Les Echos. Encore faudra-t-il y ajouter le coût des compensations que l’État octroiera finalement aux syndicats du public, que l’on ne connaît pas encore. Moyennant quoi, et nonobstant une dette publique de 3 000 milliards d’euros, le gouvernement prétendra avoir assuré "l’équilibre" financier des retraites... en faisant de la cavalerie. Une vaste fumisterie ! Et, au bout du compte, c’est l’État, déjà ultra déficitaire, qui paiera les surcoûts de la branche vieillesse.