Présidentielle : exigeons la suppression des régimes spéciaux!
Le récit initial avait tout du conte de fées : le système de retraite obligatoire par répartition allait procurer l’équité entre tous, dans la plus parfaite des solidarités. Las… Les disparités entre les générations et au sein de chaque génération n’ont jamais été aussi fortes…
L’équité intergénérationnelle se fracasse aujourd’hui sur le mur démographique du « papy-boom »… Pour le régime général des salariés du privé (Cnav), le ratio cotisants/retraités a chuté de 4,1 en 1960 à 1,4 en 2020. La Cour des comptes précise même que, « compte tenu de la démographie encore plus défavorable de la plupart des autres régimes de retraite (fonctionnaires de l’État, régimes agricoles, régimes spéciaux), ce ratio n’est plus que de 1,1 en moyenne pour l’ensemble des régimes de retraite. Cela signifie qu’en moyenne, chaque actif finance la pension d’un retraité. »[1] Résultat : les cotisations des actifs augmentent et les pensions des retraités du secteur privé diminuent par rapport au dernier revenu d’activité, en particulier celles des cadres, comme l’a montré l’actuaire Jacques Algarron[2]. Le Conseil d’orientation des retraites (COR) reconnaît lui-même, dans son rapport annuel de juin 2021, que « les générations plus jeunes seront pénalisées par des taux de cotisation plus élevés et un montant moyen de pension plus faible relativement au revenu d’activité moyen ».
Quant à l’équité entre personnes d’une même génération, elle n’existe pas davantage, notamment en raison de la survivance des régimes spéciaux de la fonction publique et des entreprises publiques. De très nettes différences continuent d’exister avec les régimes du secteur privé : mode de calcul des pensions, conditions de la réversion, âge de départ, garantie par l’État du montant de la pension des retraités du secteur public, etc. Parmi ces disparités, l’âge de départ constitue l’un des facteurs d’inégalité les plus criants entre les régimes : selon la Cour des comptes, « l’âge moyen de départ à la retraite était en 2019 d’environ 63 ans pour les fonctionnaires sédentaires et les salariés du secteur privé, d’environ 59 ans pour les fonctionnaires de catégorie active, d’environ 57 ans à la SNCF et d’environ 56 ans à la RATP »[3]. Comble de l’injustice, ce sont ceux qui bénéficient des régimes les moins généreux qui paient pour ceux qui profitent sans entrave de leur confortable régime spécial !
À quelques mois de l’élection présidentielle, il faut redire avec force que la suppression des régimes spéciaux constitue la base préalable et la condition sine qua non à toute réforme de fond du système de retraite ! C’est ce que fait Sauvegarde Retraites en soumettant à tous les candidats trois propositions impératives en matière d’équité :
- la réforme du système de retraite reposera sur le principe « À contribution égale, pension égale », ce qui implique la suppression de tous les régimes spéciaux
- aucun avantage de retraite ne pourra être financé par l’impôt, ni par un régime de retraite moins prodigue avec ses propres affiliés
- la loi empêchera le siphonnage des caisses du privé pour financer les avantages des régimes spéciaux et la captation par l’État des retraites du privé.
[1] « Une stratégie de finances publiques pour la sortie de crise », Cour des comptes, juin 2021.
[2] Cf. Jacques Algarron, La Retraite des salariés, analyse de son évolution entre générations, départs en 1993, 2008, 2013 et 2015, étude publiée par Sauvegarde Retraites.
[3]« Continuer à adapter le système de retraite pour résorber les déficits et renforcer l’équité », Cour des comptes, octobre 2021,