Fraudes aux retraites : ne payons plus pour les escrocs !

Des milliards d’euros sont indûment versés aux fraudeurs, notamment dans les pays du Maghreb. Il doit être mis fin à ce scandale qui creuse le déficit des régimes de retraite français !

Un rapport d’enquête parlementaire paru en octobre 2019 sous les signatures du député Carole Grandjean et du sénateur Nathalie Goulet, un second publié en septembre 2020 par le député Pascal Brindeau, un autre rapport, de la Cour des comptes, également paru en septembre 2020 et un récent livre (Cartel des fraudes, éditions Ring) de Charles Prats, magistrat spécialisé dans la lutte contre la fraude sociale : tous ces documents récents et renseignés montrent l’importance et le coût des fraudes dont les affiliés aux régimes de retraite font finalement les frais.

Ces fraudes sont de plusieurs sortes :

  • fausse attestation d’emploi pour liquider ses droits plus tôt ;
  • surévaluation des rémunérations ;
  • production de faux bulletins de paye pour augmenter le montant de la pension de retraite ;
  • « reconstitution » de fausses carrières longues (Charles Prats parle à cet égard de « milliers d’escroqueries aux prestations de retraite ») ;
  • dissimulation de patrimoine pour obtenir une prestation comme l’ASPA…
  • D’autres types d’abus, encore plus coûteux pour les caisses de retraites, bénéficient pourtant d’une indulgence coupable. Plus exactement, des régimes comme la CNAV ou l’AGIRC-ARRCO préfèrent nier leur importance et fermer pudiquement les yeux. Ces fraudes bénéficient à de présumés « ayants-droits » nés ou vivant à l’étranger :

    • Ainsi, les spécialistes en faux documents de la police ont déclaré à la commission d’enquête parlementaire sur la fraude sociale que le tiers des dossiers concernant les personnes nées à l’étranger devrait être rejeté. L’ampleur de la fraude est en effet considérable. Charles Prats estime que 400 000 retraites sont servies indument, à des individus ayant obtenu un numéro de sécurité sociale sur la foi de faux documents.
    • Par ailleurs, des personnes vivant à l’étranger se font frauduleusement domicilier en France, afin de percevoir le minimum retraite (ASPA) ou l’allocation supplémentaire d’invalidité (ASI).
    • Surtout, de très nombreuses familles de retraités établis, puis décédés, continuent à recevoir la pension du défunt, dont elles se gardent bien de signaler le décès. Dans le seul régime d’assurance maladie des armées, on dénombre plus de 41 000 cartes Vitale « actives » attribuées à d’anciens soldats nés avant 1920… Il est probable qu’un bon nombre de ces porteurs cacochymes de carte Vitale bénéficient aussi de pensions de retraite. Pourtant, 21 000 centenaires seulement sont officiellement recensés en France (et la majorité d’entre eux sont des femmes, qui n’ont vraisemblablement pas servi sous les drapeaux).

    Mais un très grand nombre de ces prétendus « centenaires » sont censés prolonger leur existence, ad vitam aeternam ou presque, dans les pays du Maghreb, en particulier en Algérie. Et les anciens soldats sont loin d’être seuls concernés. La présidente de la sixième chambre de la Cour des comptes, Rolande Ruellan, affirme qu’en Algérie, « le nombre de pensionnés centenaires, selon les chiffres de la Direction de la Sécurité sociale, serait supérieur au nombre de centenaires recensés par le système statistique algérien… » Cherchez l’erreur !

    Cette erreur, les pouvoirs publics français et les gestionnaires des régimes de retraite ne montrent aucun empressement à la rechercher, encore moins à la corriger. L’enjeu financier est pourtant considérable, d’autant plus que, selon la Cour des comptes, « le risque de poursuite injustifiée du versement de prestations (…) ne concerne qu’à la marge des assurés centenaires et porte pour l’essentiel sur des âges moins avancés. » Autrement dit, les fantômes centenaires ne représentent qu’une partie du spectre de la fraude.

    Charles Prats rappelle qu’une enquête de la société Excellcium, spécialisée dans la recherche des fraudes, a été interrompue après les premiers résultats obtenus en Algérie. Quant à la CNAV, dont les dirigeants s’obstinent à nier la réalité et l’ampleur du problème, elle préfère fermer les yeux sur une réalité apparemment dérangeante. Le député Patrick Hetzel, président de la Commission d’enquête dont son collègue Pascal Brindeau a été le rapporteur, écrit que « la Caisse nationale d’assurance maladie (Cnam) et la Caisse nationale d’allocation vieillesse (Cnav) refusent de procéder à des évaluations et ne donnent que les fraudes détectées ! » Circulez, il n’y a rien à voir… Pire : lorsque des parlementaires se battent pour faire la lumière sur ces ruineuses escroqueries, la haute administration organise l’opacité.

    Pourtant, au moment où la crise économique aggrave considérablement le déficit des régimes, il serait grand temps de nettoyer les écuries d’Augias du système de retraite français ! C’est à quoi veulent s’employer Patrick Hetzel et Pascal Brindeau. Ils peuvent compter sur le soutien actif de Sauvegarde Retraites dans cette tâche indispensable. Notre association a organisé au sujet de ces fraudes une pétition à laquelle ses membres ont répondu massivement, en nous faisant souvent part de leur indignation. Fort de leur appui et de leur mobilisation, nous poursuivrons notre campagne de sensibilisation, sans rien lâcher.

    In fine, ce sont les actifs cotisant aux régimes de retraite en France qui paient pour les escrocs !


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