Unifier la nature des régimes du public et du privé

Le 17 décembre dernier, Sauvegarde Retraites interpellait le Premier ministre afin de faire concrètement de l'égalité entre le public et le privé une priorité, en mettant fin notamment aux cotisations fictives des fonctionnaires.

Monsieur le Premier Ministre,

La présentation de la future réforme « systémique » des retraites, que vous avez faite le 11 décembre devant le Conseil économique, social et environnemental, a laissé les retraités du privé très dubitatifs.

Certes, vous confirmiez la création d’un système de retraite universel et annonciez la fin des régimes spéciaux du secteur public. Mais, en réalité, celle-ci a été renvoyée aux calendes grecques :

  • Les affiliés aux régimes spéciaux nés avant 1975 ne seront pas concernés par la réforme.
  • Ceux qui appartiennent aux générations nées entre 1975 et 2004 seront progressivement touchés par la réforme mais vous précisez vous-même que les pensions des natifs de 1975, lorsqu’ils partiront à la retraite, seront calculées à 70 % sur l’ancien système.
  • Dans le meilleur des cas, seuls les « nouveaux entrants » intégreront le régime universel, c'est-à-dire la génération 2004 qui arrivera sur le marché de l’emploi à partir de 2022. Autrement dit, si l’on s’en tient à votre annonce, les régimes spéciaux subsisteront au moins jusqu’à l’arrivée à l’âge de la retraite de cette génération - en 2065 dans le meilleur des cas -.

Nous précisons « dans le meilleur des cas », Monsieur le Premier Ministre, car l’expérience nous a appris que les régimes spéciaux ont la vie dure. Vous avez souligné vous-même, au cours de votre allocution, qu’en 1945, lors de la création de la Sécurité sociale, il était déjà prévu qu’ils disparaissent. Ils ne devaient être maintenus qu’à titre provisoire. De même, la loi du 24 décembre 1974 disposait qu’un « système de protection sociale commun à tous les Français [serait] institué, au plus tard le 1er janvier 1978 » et que les régimes de base obligatoires seraient « progressivement harmonisés ». Plus de quarante ans ont passé et les régimes spéciaux sont toujours là. Il est des "provisoires" qui durent…

Les retraités du privé ne sont plus dupes des promesses des politiques, qui n’engagent que ceux qui les croient. La première condition de la mise en place d’un régime universel, et sa première étape, est la suppression des régimes spéciaux, non pas dans un demi-siècle, mais dès l’entrée en vigueur de votre réforme. L’argument qui prend prétexte, pour la différer, d’un « pacte » ou d’un « contrat » tacite avec telle ou telle profession, ne tient ni devant les réalités de l’heure, ni devant l’expérience passée : en 1993, personne ne s’est posé de telles questions pour réformer drastiquement les régimes de retraite du privé !

Pour établir l’équité et l’universalité du nouveau système de retraite, la première mesure à prendre consiste à unifier la nature des retraites du privé et du public.

À cette fin, nous vous demandons, Monsieur le Premier Ministre, de faire en sorte :

  • que les pensions des fonctionnaires et des agents de l’Etat ne soient plus payées sur le budget public, mais financées par les cotisations des fonctionnaires, aux mêmes taux que dans les régimes du privé ;
  • que ces cotisations des agents de l’Etat, qui sont aujourd’hui fictives (au point qu’il n’existe même pas de caisse des fonctionnaires de l’Etat !) soient réellement versées aux régimes qu’elles doivent financer, de manière à en assurer l’équilibre financier ;
  • et que ces régimes du public fonctionnent avec la même logique assurantielle que ceux du secteur privé et un régime structurellement à l’équilibre (donc à cotisations définies et non plus à prestations définies).

C’est la condition sine qua non d’une véritable réforme et de l’équité entre les retraités.


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