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Comment les cheminots contournent la réforme des retraites pour préserver leurs privilèges

À la SNCF, c’est Noël en avril ! Le gouvernement et le PDG de l’entreprise publique, Jean-Pierre Farandou, viennent de faire aux syndicats un cadeau comme ceux-ci n’en espéraient même pas. Sans se soucier que ce "cadeau" soit payé en bout de course par les contribuables et par les régimes du privé. Trop, c’est trop !

Un contrôleur de la SNCF s’en réjouit dans Le Parisien du 18 avril : « En fait, c’est comme si on n’avait pas eu de réforme des retraites l’année dernière. On nous a allongés de deux ans, mais on récupère un an et demi maintenant. » Le régime spécial a beau être prétendument " fermé ", les réformes, c’est pour les autres, les moutons du privé bons à tondre. Les syndicats maison, CGT et CFDT-Cheminots, UNSA-Ferroviaire et même Sud-Rail crient victoire. Le chantage à la grève a fonctionné à plein : les pouvoirs publics sont prêts à tout pour éviter qu’un " mouvement social " ne gâche les J.O. Quoi qu’il en coûte…

L’accord proposé par la direction de la SNCF prévoit d’allonger le dispositif de « cessation anticipée d’activité » préexistant et de relever les rémunérations, afin de permettre aux cheminots de partir à la retraite plus tôt dans de meilleures conditions. L’ensemble des agents pourront bénéficier de ce dispositif dix-huit mois avant la fin de leur carrière, la moitié de ce temps (neuf mois) étant travaillée et rémunérée à 100 % du salaire, et l’autre moitié non travaillée et rémunérée à 75 % (comme dans les conditions de la retraite au régime spécial de la SNCF). En outre, la SNCF prendra en charge la totalité des cotisations à temps plein, patronales et salariales.

Pour certaines spécialités, comme les conducteurs, aiguilleurs et techniciens de maintenance, cette durée peut être portée de 18 à 24 ou 30 mois, voire 36 pour les contrôleurs, le tout « avec un supplément de rémunération de 10% » souligne Sud-Rail dans un communiqué de victoire.

Ce syndicat se félicite également de la possibilité donnée aux cheminots de « bénéficier de la retraite progressive 2 ans avant l’âge minimum légal de départ du régime général », accompagnée de « formules fixes revalorisées en durée et en rémunération ». Est également annoncée la création :

- d’un échelon d’ancienneté supplémentaire (en plus d’un précédent, déjà mis en place en janvier 2024)

- d’un « niveau de fin de parcours » et de deux « positions de rémunération » supplémentaires, pour certains salariés et les conducteurs

- d’une indemnité forfaitaire sur trois ans (de 250 à 170 euros par mois, susceptible d’être majorée au gré des différentes sociétés du groupe) destinée à faciliter la reconversion vers d’autres tâches de salariés exerçant depuis 20 ans l’une des 81 activités qualifiées d’emplois " à pénibilité avérée " (mais pas plus pénibles que de nombreux métiers du secteur privé).

À ce prix, ou à ce coût, Jean-Pierre Farandou peut espérer avoir déminé le terrain social à l’approche des J.O., en attendant de connaître « ses propositions définitives sur les conditions de travail et la prime JO », écrit Marie-Hélène Poingt, journaliste à La Vie du Rail

Or, la SNCF, étant un groupe public dont l’Etat est propriétaire à 100 %, le coût de ces mesures et de ces dispositifs retombera, in fine, sur l’ensemble des contribuables français – mais aussi sur les régimes du de retraite du secteur privé, priés par le gouvernement de " contribuer " au financement du système de retraite, en participant, concrètement, au financement des régimes spéciaux du public, dont les déficits abyssaux creusent la dette publique (la dette de la SNCF elle-même dépasse encore 24 milliards d’euros, malgré la reprise par l’Etat de 35 milliards de dettes en 2020 et 2022, décidée en 2018 par Edouard Philippe).

Ainsi, " en même temps " que la SNCF conforte les privilèges retraite de ses agents, le gouvernement introduit dans la LFSS pour 2024 cette " contribution " des régimes du privé au financement des régimes spéciaux des entreprises publique (la soulte versée par la CNAV et l’AGIRC-ARRCO à la SNCF ayant servi de modèle). Et comme si cela ne suffisait pas, le ministre du Travail, Catherine Vautrin, revient à la charge pour ponctionner les réserves de l’AGIRC-ARRCO ! Qui osera encore parler d’équité et de justice sociale ?


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