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Retraites : le Sénat adopte un report progressif de l’âge de départ à 64 ans

Les sénateurs demandent la convocation d’une « convention nationale pour l’emploi des seniors et la sauvegarde du système de retraites ». En cas d’absence d’accord pour ramener le régime des retraites à l’équilibre, le Sénat a inscrit des mesures automatiques dans le budget de la Sécurité sociale

C’est devenu une constante au Sénat. Depuis le début du quinquennat précédent, la majorité de droite et du centre intègre systématiquement à chaque budget de la Sécurité sociale une disposition pour ramener le régime des retraites à l’équilibre. L’examen du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2023 n’a pas échappé à la règle. L’annonce du projet de réforme du gouvernement en janvier 2023 n’y a rien changé, la droite sénatoriale a voulu marquer un acte politique, en intégrant des mesures d’âge automatiques en cas d’absence de compromis des partenaires sociaux, dont le report de l’âge légal de départ à 64 ans. En fin d’examen ce samedi 12 novembre, les sénateurs ont adopté les dispositions proposées par le rapporteur de la branche vieillesse, René-Paul Savary (LR), par 195 voix contre 130.

Opposé à cette méthode, le gouvernement aura la possibilité de retirer ces dispositions, dans la suite de la navette parlementaire. « Nous avons fait le choix de la concertation et d’un projet de loi en janvier, pas d’une mesure dans un projet de loi de financement de la Sécurité sociale », a fait valoir Jean-Christophe Combe. Le ministre des Solidarités, de l’Autonomie et des Personnes handicapées a cependant reconnu que l’exécutif et la majorité sénatoriale se rejoignaient « sur les objectifs et les thèmes » soulevés. Actuellement, plusieurs cycles de discussions sont ouverts au ministère du Travail, celui sur le financement devant s’engager le 28 novembre. « N’anticipons pas les débats que nous aurons prochainement […] On préfère ne pas cadrer en avance les termes du débat », a demandé le ministre. Pourtant, Emmanuel Macron avait lui-même pris l’engagement pendant la campagne présidentielle d’un report de l’âge légal.

« Par cet amendement, vous connaissez notre position », résume Philippe Mouiller (LR)

Lors des débats, certains orateurs ont reproché à la droite son absence lors d’une réunion avec les parlementaires au ministère du Travail, dédiée à la question des retraites.

Dans le détail, les sénateurs prévoient dans leur texte la convocation d’une « convention nationale pour l’emploi des seniors et la sauvegarde du système de retraites », qui réunira les partenaires sociaux, Etat, associations familiales et associations de retraités, ainsi que des experts.

Charge à elle de formuler des propositions pour ramener le régime des retraites à l’équilibre d’ici 2033. Elle devra aussi dresser des solutions pour favoriser le maintien des seniors dans l’emploi, une « condition sine qua non » de toute réforme selon la commission des affaires sociales du Sénat. Autre sujet sur la table de cette convention : prendre en compte la pénibilité du travail, du handicap et des carrières longues pour le calcul des droits et l’aménagement du temps de travail.

Dans le scénario idéal du Sénat, les conclusions de la convention aboutiront à un projet de loi. En cas d’échec, les changements de paramètres intégrés par le Sénat dans le même amendement s’appliqueront dès le 1er janvier 2024. Comme l’an dernier, la réforme sénatoriale reporte progressivement (de trois mois par an) l’âge légal de départ en retraite, pour parvenir à 64 ans à partir de la génération 1967. Le texte accélère également la réforme Touraine, en exigeant 43 années de cotisations pour obtenir une retraite à taux plein dès la génération 1967, et non plus 1973. Ces deux mesures représentent près de 16,5 milliards d’euros de nouvelles recettes pour la branche vieillesse en 2030, d’après le rapport de René-Paul Savary. De quoi combler le trou des régimes obligatoires de base, attendu à 13,6 milliards d’euros en 2026 dans le projet de loi.

De plus, l’amendement sénatorial ouvre la voie à la convergence des régimes spéciaux à toutes ces modifications « avant 2033 », les conditions et le calendrier étant renvoyés à un décret en Conseil d’Etat.

La gauche dénonce « l’injustice » de cette réforme

Les groupes de gauche ont dénoncé l’amendement introduit par leurs collègues de droite et du centre. Monique Lubin, pour les socialistes, a dénoncé une « réforme d’une injustice incroyable » mais aussi les « discours alarmistes » sur la trajectoire financière du système de retraite. « Si le Sénat adopte cet amendement, il participera à écrire l’une des pages les plus inégalitaires sur le plan social », a averti l’écologiste Raymonde Poncet Monge. Quant aux communistes, ils ont vilipendé un « cocktail explosif de mesures régressives », selon les mots de Cathy Apourceau-Poly.

Favorables sur le fond, les Indépendants de Claude Malhuret se sont abstenus, arguant que les « prémices de la réforme » étaient en cours. Le Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants (RDPI), membre de la majorité présidentielle, a voté contre. Le groupe RDSE (Rassemblement démocratique et social européen), qui réunit plusieurs membres du Parti radical, a lui refusé de soutenir l’amendement LR, malgré le « besoin de recettes supplémentaires » pour les retraites. « L’année prochaine, si les choses ne sont pas réglées, je peux vous assurer qu’il en sera autrement », a toutefois prévenu Bernard Fialaire.

Quelques rares membres de la majorité sénatoriale ont choisi l’abstention, comme le centriste Jean-Marie Vanlerenberghe, qui considérait que l’amendement allait « un peu loin ». « Il faut aussi que cette réforme soit acceptée socialement, et politiquement. Sinon on sera à la merci de revenir à la faveur d’une autre majorité sur cette réforme », a mis en garde l’ancien rapporteur général de la commission des affaires sociales.

C’est également cette méthode qu’a défendue le ministre. « On essaye de concilier avec notre méthodologie la nécessité d’aller vite, et en même temps d’assurer une acceptabilité sociale et politique de cette réforme, dans une concertation large », a insisté Jean-Christophe Combe.

Réforme des retraites : la proposition de reporter l’âge légal de départ à 64 ans retenue par le Sénat

La proposition du sénateur René-Paul Savary de porter l'âge de départ en retraite à 64 ans a été votée au Sénat samedi, contre l'avis du gouvernement. Mais l'exécutif, qui tient à son propre projet de réforme, devrait encore recourir au 49.3.

Un amendement du sénateur René-Paul Savary (LR) au projet de loi de financement de la sécurité sociale 2023 proposant de relever l’âge légal de la retraite à 64 ans a été adopté samedi 12 novembre contre l’avis du gouvernement.

Passé à 195 voix pour, 130 contre et 19 abstentions, le texte prévoit l’organisation d’une convention nationale sur la réforme des retraites en vue de formuler les mesures pour un retour à l’équilibre avec prise en compte de la pénibilité, des carrières longues et l’emploi des seniors. Et si la convention n’aboutit pas, un report à 64 ans de l’âge légal de départ à la retraite et un allongement de la durée de cotisation avec l’accélération de la loi Touraine.

Le gouvernement salue une proposition "cohérente"

Des mesures dont le ministre des Solidarités, Jean-Christophe Combe a salué « la cohérence » et a assuré rejoindre M. Savary « sur les objectifs », mais « nous avons fait le choix de la concertation et d’un projet de loi en janvier, pas d’une mesure dans un projet de loi de financement de la Sécurité sociale », lui a-t-il opposé.

Majoritaire au Sénat, la droite a réussi à faire passer l’amendement en dépit de l’opposition de Renaissance et de la gauche, ainsi que de l’abstention de quelques centristes alliés du gouvernement.

Le texte a toutefois peu de chances de voir le jour, alors que le gouvernement devrait à nouveau recourir au 49.3 pour faire passer son texte devant l’Assemblée nationale.

Le gouvernement prêt "à faire évoluer les paramètres"

L’amendement du sénateur René-Paul Savary est à interpréter comme une main tendue à la recherche d’un compromis avec l’exécutif. Son introduction n’est pas une surprise : le président du Sénat, Gérard Larcher, avait fait savoir en septembre que le Palais du Luxembourg profiterait de l’examen du PLFSS pour participer au débat sur la réforme des retraites.

« Il y a sur le papier au Sénat comme à l’Assemblée une majorité pour adopter une réforme des retraites qui va dans le sens d’un recul de l’âge de départ à la retraite. La majorité la soutiendra bien sûr, et les LR ont quant à eux fait campagne sur ce sujet », avait réagi le ministre des Comptes publics dans les colonnes des Echos du 4 novembre, après que l’amendement de M. Savary avait été retenu en commission des Affaires sociales.

Gabriel Attal a déclaré que le gouvernement « était prêt à faire évoluer les paramètres, mais en restant dans [la] philosophie » du projet du président de la République de reculer l’âge de départ de 4 mois par an à partir de l’été prochain.

Et si aucune coalition "structurelle" des LR avec la majorité ne semble toujours pas espérée, le ministre compte bien saisir l’occasion d’une alliance sur le sujet de la réforme des retraites : « On peut et on doit trouver des alliances sur quelques textes », a-t-il souligné.


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