Réforme des retraites promise, réforme dûe !

Emmanuel Macron a promis de réaliser une vraie réforme, supprimant notamment les régimes spéciaux. Les retraités sauront le lui rappeler.

La réforme des retraites aura-t-elle finalement lieu ? Emmanuel Macron avait inscrit dans son programme de campagne la disparition des régimes spéciaux et le passage à un régime universel, par points ou par comptes notionnels, pour réformer le système des retraites, qualifié de « complexe » et d’ »injuste ».

Ce document déclarait le temps des réformes paramétriques révolu : « L’enjeu aujourd'hui n’est donc pas de repousser l’âge ou d'augmenter la durée de cotisation. (…) Notre projet, ce n'est pas de changer encore une fois tel ou tel paramètre du système de retraites. (…) Il est de clarifier et de stabiliser les règles du jeu, une fois pour toutes, en mettant en place un système universel, juste, transparent et fiable, dans lequel chacun bénéficie exactement des mêmes droits. »

Entre autres propositions formulées dans ce document, figuraient :

  • La création d’un système universel de retraites « où un euro cotisé donne les mêmes droits, quel que soit le moment où il a été versé, quel que soit le statut de celui qui a cotisé. » Ainsi, « Fonctionnaires, salariés, indépendants auront tous les mêmes droits, le calcul de la retraite sera le même pour tous. On saura que, quand des personnes ont une retraite plus élevée, c’est qu’elles-mêmes, leurs employeurs, ou l’Etat au titre de la solidarité, ont cotisé davantage. »
  • L’inscription sur un compte individuel des cotisations, « aux régimes de base comme aux régimes complémentaires », et leur revalorisation « chaque année selon la croissance des salaires. Ainsi, chaque euro cotisé accroîtra de la même manière la pension future, quel que soit le statut du travailleur et l'origine de cette cotisation » .
  • La conversion, au moment de la retraite, du total des droits accumulés en une pension « à l’aide d’un coefficient de conversion fonction de l’âge de départ et de l’année de naissance. L’allongement de l’espérance de vie est donc pris en compte en continu, au fil des générations : plus besoin de réformes successives, qui changent les règles et sont anxiogènes et source d’incertitude ».
  • La recherche de l’équilibre financier, sur le long terme. Il était en outre précisé que les taux de cotisations pourraient rester différents (par exemple pour les indépendants) et que les spécificités de certains régimes ne disparaîtraient pas (« Les règles de base seront les mêmes pour tous, mais les taux de cotisation ou les conditions d'âge pourront différer, en raison notamment des caractéristiques des métiers. »).

Le programme comporte certaines lacunes, en particulier le maintien du "tout répartition". Néanmoins, il annonce enfin une vraie réforme structurelle, recherchant à la fois l’équité et l’équilibre financier.

Reste à savoir dans quelle mesure le gouvernement est décidé à l’imposer, contre le vœu des syndicats de la fonction publique, mais aussi des technocrates et des hauts-fonctionnaires appelés à mettre en œuvre le projet.

Les résistances se dessinent déjà, en avançant des arguments fallacieux. Par exemple, on pouvait lire dans le programme d’Emmanuel Macron : « Après plus de vingt ans de réformes successives, le problème des retraites n’est plus un problème financier. Les travaux du Conseil d’Orientation des Retraites, qui font référence, le montrent : pour la première fois depuis des décennies, les perspectives financières permettent d'envisager l'avenir avec "une sérénité raisonnable" selon le Comité de Suivi des Retraites. » Hélas ! Dans son rapport annuel, publié en juin, le COR faisait état d’une dégradation des perspectives financières…

En définitive, Emmanuel Macron compte-t-il vraiment tenir sa promesse de réformer en profondeur le système de retraites ? S’il vient à l’oublier, il peut en tout cas être sûr que les retraités la lui rappelleront, à temps et à contre-temps.

Article publié le 31 août 2017. Notre serveur connaît encore des dysfonctionnements en voie de résolution.

CSG : une taxation longuement mûrie

Voilà plus de dix ans que les rapports officiels et les travaux des organismes publics préparent l’opinion à la taxation des retraités.

La hausse de la CSG qui va frapper les retraités prétendument aisés au profit (annoncé…) des actifs n’a pas été inscrite inopinément dans le programme électoral d’Emmanuel Macron.

L’un des premiers rapports importants publiés dans ce sens, dès 2008, avait été signé et présenté au Conseil des prélèvements obligatoires par un jeune inspecteur des Finances nommé… Emmanuel Macron.

Dans ce texte, intitulé « La répartition des prélèvements obligatoires entre générations et la question de l’équité intergénérationnelle », le futur président de la République exposait que les retraités sont plus riches que les actifs et disposent d’un patrimoine plus important les transferts sociaux leur profitent davantage et même lorsque leur aisance leur permet d’aider leurs descendance, cette aide accroît les inégalités sociales.

Pour y remédier, il recommandait de « prendre en compte l’équité intergénérationnelle dans la stratégie fiscalo-budgétaire française », en recourant à divers procédés destinés à faire payer les "seniors" :

  • « accroître la CSG sur les pensions (6,60% aujourd’hui) afin de l’aligner sur le taux de la CSG sur les revenus d’activité (7,50%) en affectant à la réduction de l’endettement social cet accroissement de ressource »
  • « amortir plus rapidement la dette sociale afin de limiter les effets de transferts et concentrer son remboursement sur les générations qui l’ont produite et sur les générations qui les suivent immédiatement »
  • créer une taxe carbone, qui pèserait « relativement plus sur les ménages les plus âgés »
  • ou encore, procéder à « une hausse uniforme des impôts sur le patrimoine », dont les conséquences seraient « nettement défavorables aux dernières classes d’âge, tant en niveau de prélèvements qu’en poids sur le revenu disponible. Dans tous les cas, l’alourdissement de prélèvement est croissant avec l’âge. »

D’où la nécessité de les taxer davantage, afin que l’Etat-Providence assure une redistribution des biens plus équitable.

Les principaux thèmes du rapport Macron ont été repris et développés par de nombreux institutions et organismes, en particulier :

1. La Cour des comptes, dans son rapport sur la Sécurité sociale de septembre 2012. Elle y proposait une série de mesures « envisageables », notamment :

  • la suppression de l’abattement de 10 % sur les pensions en matière d’impôt sur le revenu
  • l’assujettissement à l’impôt sur le revenu des majorations de pensions pour les parents de trois enfants (cette mesure, dont la Cour soulignait au passage les « divers effets induits sur les taxes foncière et d’habitation » a été inscrite dans la réforme de 2013) ;
  • la soumission à conditions de ressources de l’exonération de cotisations patronales dont bénéficient certaines catégories de particuliers employeurs
  • l’extension de l’assiette de la cotisation d’assurance maladie au taux de 1 % à toutes les retraites complémentaires ainsi qu’aux pensions de base (au-dessus d’un certain seuil)
  • … et l’alignement du taux plein de CSG (6,6 %) sur celui appliqué aux salaires (7,5 %).

2. Le Conseil d’Orientation des Retraites, dans plusieurs rapports publiés en juin, juillet et décembre 2015, et en juin 2016, qui, pour la plupart, soulignent la situation avantageuse des retraités.

3. Le Commissariat général à la stratégie et à la prospective, également appelé France-Stratégie. En mars 2016, ce « laboratoire d’idées public » dépendant du Premier ministre a publié une étude intitulée « Jeunesse, vieillissement : quelles politiques ? » Evoquant la « dégradation de la situation des jeunes », dont le sort « continue de s’améliorer par rapport à celui des générations précédentes, mais (…) se détériore par rapport à celui des seniors », France stratégie se prononçait en faveur d’ « un rééquilibrage des transferts public des âgés vers les jeunes et les actifs », à travers la baisse des pensions ou le report de l’âge de départ et une fiscalité ciblée : « Une plus grande mise à contribution des plus âgés peut passer par une réduction des différences de taxation selon l’âge dans le système actuel sans en modifier la structure. Elle peut aussi passer par une réforme plus profonde visant à transférer le financement des dépenses sociales du travail vers d’autres assiettes détenues par les plus âgés (ensemble des revenus, patrimoine). Il est également envisageable d’accompagner une réorientation des transferts publics par une action visant à modifier – notamment par la fiscalité – les flux de transferts privés (aides familiales, donations, successions, développement du viager). »

France-Stratégie était à cette époque dirigé par Jean Pisani-Ferry. Ce haut-fonctionnaire, ancien conseiller économique des ministres de l’Economie Dominique Strauss-Kahn et Christian Sautter, a démissionné en janvier 2017 de France stratégie pour rejoindre l’équipe de campagne d’Emmanuel Macron, comme responsable du programme économique.

En juin 2017, le nouveau président de la République l’a chargé de préparer la prochaine réforme des retraites…

Article publié le 24 août 2017. Notre serveur connaît encore des dysfonctionnements en voie de résolution.



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