Vous ne le saviez pas ? C’est pourtant la loi du genre en France, particulièrement en ce qui concerne les régimes spéciaux : deux poids, deux mesures et un siphonnage astucieux de fonds publics et privés vers les retraités des régimes spéciaux !
Commençons par lister les "petits" avantages non négligeables des retraités d’EDF : 75 % du dernier salaire ; une cotisation à 7,85% ; départ à 60 ans pour les non actifs mais à 55 ans avec 15 ans de service au minimum pour les actifs (ils sont environ 56 000). Pour eux encore, bonus de deux mois par année travaillée, ce qui permet de prendre une retraite pleine après seulement 32 années de présence. A cela, ajouter les avantages familiaux - 1 annuité pour 1 enfant, 3 annuités pour 2 enfants, 4 annuités pour 3 enfants etc…- sans oublier la pratique courante du «coup de chapeau» plusieurs mois avant le départ en retraite. Retraite moyenne : 1 780 euros.
Un tel super-régime coûte extrêmement cher : 2,45 milliards d’euros par an, dont les cotisations n’arrivent même pas à financer la moitié. 59 %* du financement provient d’une «contribution d’équilibre» versée par l’entreprise. Autant dire par vous et moi, en notre qualité de contribuable et d' usager.
Le changement de statut d’EDF avant le 1er juillet 2004, demandé par Bruxelles, va-t-il modifier la donne ? Certainement pas et bien au contraire ! Pour rester attractive avec l’ouverture de son capital, EDF ne doit surtout pas grever ses comptes avec la retraite de ses employés. Lesquels, si l’entreprise devait provisionner en une seule fois ses retraites (droits passés), devraient afficher un passif de 50 milliards d’euros. Soit l’équivalent d’une année de chiffre d’affaires. Impossible !
Négociée depuis deux ans par les syndicats et la direction, la solution a été trouvée, et sans qu’aucun des privilèges des retraités d’EDF ne soit remis en cause : c’est nous tous, contribuables et usagers, qui continuerons à payer. On efface la dette comme par magie, juste en versant une soulte de 3 à 7 MM d’euros au régime général et de 8 à 10 MM d'euros à l’Arrco et l’Agirc. Soit au maximum, rapporté aux 50 milliards évoqués plus haut, 25 à 30 % de la somme réellement due...
Le tour est joué et vogue la galère. Pas pour les 110 000 retraités d’EDF pour qui la vie continue à être belle ! Mais pour les 15 millions de retraités du régime général qui vont devoir les supporter, année après année. Et qui vont voir s’amputer leurs propres droits et le montant de leurs propres pensions pour assurer la pérennité des retraites superavantageuses d’une poignée de privilégiés !
*Source : IFRAP. Juin 2003.
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