Le bonus très spécial de Dominique de Villepin

En une journée, l’ancien Premier ministre de Jacques Chirac a gagné une « retraite anticipée »  évaluée à 70 000 euros ! 

C’est peut-être le jour de travail le mieux payé de l’année : en retournant pendant 8 heures au ministère des Affaires étrangères en septembre dernier, l’ancien Premier ministre Dominique de Villepin, qui appartint lui-même au Quai d’Orsay jusqu’en 1993, a pu profiter d’un dispositif de retraite « maison », créé au bénéfice de quelques hauts fonctionnaires de ce ministère : un décret du 8 juin 2011 permet en effet à trente d’entre eux de quitter leur fonction dès 58 ans, tout en continuant d’être payés jusqu’à l’âge de la retraite.
À la clé, pour Villepin : un cadeau de 70 000 euros ! Le décret exclut toutefois de son bénéfice les fonctionnaires en disponibilité ou en détachement – comme Dominique de Villepin, qui n’occupait plus de fonction au Quai d’Orsay depuis 1993, époque à laquelle il devint directeur de cabinet d’Alain Juppé. Mais il lui a suffi, pour contourner l’obstacle, de réintégrer son administration d’origine, fût-ce pendant quelques heures, après 21 ans d’absence ! Grâce à cette pirouette, l’ancien Premier ministre, âgé de plus de 58 ans, a pu détourner la lettre du décret pour postuler au « club des trente » et obtenir, aux frais des contribuables, un avantage injustifié.

Au cours de cette période, les « Trente » perçoivent au maximum leur traitement de fin d’activité augmenté de l’indemnité de résidence, plus au minimum un tiers de cette somme – selon qu’ils exercent, ou pas, une nouvelle activité rémunérée. S’y ajoute encore une « prime d’adieu » – sorte de « golden parachute » – égale à la moitié de la plupart des primes qu’ils auraient touchées s’ils étaient restés en fonction jusqu’à l’âge normal de la retraite.
En l’occurrence, Dominique de Villepin mérite d’autant moins cette « prime d’adieu » qu’elle est constituée à partir d’une « prime de rendement », d’une « indemnité pour travaux supplémentaires » et d’une « indemnité de résultats » – auxquelles, ayant quitté le ministère, il ne pouvait évidemment pas prétendre.

Rien d’illégal, à proprement parler mais tout ce qui est légal n’est pas moral. L’ancien Premier ministre a fait montre d’un bel opportunisme pour obtenir, alors que tous les Français sont invités à consentir des sacrifices, un traitement de faveur qui s’inscrit à contre-courant de la politique conduite depuis des années en matière de retraite : fin des retraites anticipées, recul de l’âge de liquidation des droits, tentative de réduire progressivement les avantages exorbitants des régimes spéciaux…

Mais Dominique de Villepin n’est pas un cas unique en politique : avant lui, au début des années 2000, Alain Juppé et Laurent Fabius ont réintégré l’Inspection des Finances et le Conseil d’Etat pour bénéficier d’une disposition, supprimée depuis, qui permettait aux parlementaires issus de la fonction publique de liquider leur retraite de fonctionnaire à 50 ans. Citons aussi les cas de Michel Vauzelle, ancien conseiller de François Mitterrand et président du Conseil régional de la région PACA, qui jouit depuis 2010 d’une retraite de préfet, sans en avoir jamais exercé les fonctions ou d’Anne Hidalgo, candidate à la mairie de Paris, qui a réintégré précipitamment son administration d’origine, l’inspection du travail, pour liquider sa retraite dès 52 ans.

Faites ce que je dis, pas ce que je fais… Les responsables politiques français font décidément preuve d’un curieux sens du bien commun !


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