SNCF : derrière la grève, la bataille des retraites

Côté rue, les cheminots semblent avoir perdu la bataille. En coulisses, rien n’est moins sûr. Comme en 2007, leur dernière grève ressemble fort à une répétition générale avant le rendez-vous sur les retraites.

Pour Dominique Bussereau, « cette grève n'a servi à rien puisqu'il n'y a pas eu de négociations ». Voire. Officiellement, les cheminots protestaient contre la réduction des effectifs. Mais c’est bien vers la défense du régime spécial de retraite de la SNCF, prétendument réformé en 2007, que les arrière-pensées syndicales étaient tournées, comme en témoigne cet aveu d’Eric Ferreres, secrétaire fédéral CGT : « Il y a une volonté politique de faire mettre un genou à terre aux cheminots à l’approche de la réforme des retraites. » Dans la bouche d’un tel dialecticien, la formule inverse est équivalente : « Il y a une volonté politique de la part des cheminots de mettre la pression avant le rendez-vous 2010 sur les retraites. »

L’histoire semble donc se répéter : même cause et mêmes effets qu’en 2007, avec ce grand mouvement de grève juste avant la réforme des régimes spéciaux. Un remake dont on souhaiterait la conclusion moins cruelle pour le contribuable : non seulement les concessions marginales alors consenties par les cheminots avaient été compensées, mais encore la compensation fut si large que le régime de la SNCF coûte aujourd’hui plus cher qu’avant la réforme.

La preuve par les chiffres : l’évolution comparée du nombre de retraités et du coût du régime (montant global des pensions versées) montre qu’en trois ans, la facture a augmenté de 4,8 % (de 4,84 à 5,07 milliards d’euros, soit un surcoût de 232,6 millions d’euros) quand le nombre de retraités diminuait de 3,6 % (de 295 519 à 284 850, soit 10 669 retraités en moins).

Evolution comparée du coût du régime et des effectifs (sur base 100 en 2007)

2007

2008

2009

2010

Nb de retraités

100

99,2

98,2

96,4

Coût du régime

100

102,7

104,1

104,8

Source : commission des comptes de la Sécurité sociale, oct. 2009

Rappelons, au surplus, que les compensations salariales largement dispensées en 2007 ont conduit à un résultat similaire : la masse globale des rémunérations a augmenté de 10,7 % quand les effectifs de la SNCF diminuaient de 2,6 %.

Une manière de souligner que, pour les syndicats de cheminots, la grève peut fort bien payer, même lorsque la bataille semble perdue. Une curieuse conception de la solidarité chez ces champions autoproclamés de l’altruisme. Dans un monde solidaire pour lequel ils prétendent se battre, on aurait pu imaginer qu’au moment même où les avions étaient cloués au sol, davantage de trains seraient affrétés. Bien au contraire, ils ont tout bloqué et c’est au contribuable de payer la facture.


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